L’analité du nombrilisme

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Je me pointe comme l’aube au bout de la nuit, le visage scintillant de toutes les promesses du renouveau. Je m’ouvre doucement au monde et c’est presque comme si je m’y étalais.

Je m’introduis chat cadence sur la pointe des pieds. Ma démarche velours fait sous mon poids gargantuesque craquer le monde en éclats de verre. Le son d’un ancien monde. Je marche sur les ossements des derniers hommes.

 

 

Les craquelures balafrent la terre, cicatrices encore fraîches du passage de la civilisation. C’est beau. C’est moche.

C’est moi projeté hors de ma propre prison. Brillant irradiant de l’aura pâle des jours mauvais. Assombrit par les successives éclipses solaires de cette série de champignons nucléaires que sont les Temps Modernes.

Ces jours glorieux pendant lesquels nous avons tutoyé Dieu. Prenant goût à cette saveur de plénitude qu’est l’omnipotence. L’infinité du pouvoir. Du possible. 

C’est moi projeté hors moi. Dans une dimension parallèle et subatomique.

C’est moi exilé, asiléDans une réalité astrale en lévitation au-dessus de quelque chose d’informe et d’inerte. Supra. Toujours.

C’est moi vomi hors de je. Projection de l’ombre à la lumière. Sauf qu’il n’y a que des ombres et des lumières illusoires.

À y regarder de plus près, c’est magnifique, c’est aveuglant, c’est incompréhensible, c’est épouvantable.

Un langage nouveau, une sémantique à découvrir, une sonorité bizarroïde, un aspect hétéroclite. Le selfie de mon réel est une œuvre d’horreurs. La photographie est en clair-obscur, une impression déviante mouvante prolongée indéfiniment.

 

 

Les vôtres. Je ne sais pas. Indéfinissables. À y regarder de près, il n’est jamais certain s’il s’agit d’un nombrilisme ou d’une analité.

Peut(-)être les deux. 

Ce n’est pas si évident que ça.

Capté en mode macro différencier un nombril d’un anus n’est pas chose aisée. Là réside sans doute la grande réflexion de ce siècle.

Souriez. Vous êtes selfiés.

 

 

Les années ont tiré leur révérence, l’intemporel zéro commence demain. Il n’y a plus d’hommes, il reste des larves, dans des bocaux sociaux. Les quatre saisons sont mortes, et la grande déglaciation arrive en hiver. Elle promet le renouveau.

Le renouveau. Cela à mon oreille comme les musiques d’hier, comme si la ré-invention de l’eau chaude revêtirait un caractère inédit. Le renouveau une escroquerie.

 

 

Je me pointe telle l’aube s’ouvre sur une scène ravagée.

C’est poétique.

Il y a quelque chose de beau dans la laideur. De romantique dans le chaos. De lyrique dans le silence apocalyptique. De profond dans ce selfie de la modernité.

C’est surréaliste.

Des ouvriers ensevelis sous les usines. Des cités-dortoirs comme autant de goulags. De la morbidité de la surconsommation. Du droit fondamentalement humain à la déprédation.

Il n’y a plus de chats dans les rues de Pékin. Dernier festin du Dragon.

C’est le calme plat. Moins serein que celui des morts. Aussi insupportablement incertain que celui des disparus.

 

 

Point de prologue.

J’ai le monologue sur le bout de la langue comme le fromage dans le bec du corbeau. Je déblatère mal. Et bien naturellement, ça ne finit pas bien.

Il n’y a pas de renard. Juste moi, hors moi, projeté, répétant inlassablement: tout scribouilleur vit aux dépens de celui qui le lit.

Marc levy, E.L. James, Danielle Steel, Guillaume Musso, Eric-Emmanuel Schmitt m’ont précédé. Ils ont fait le plus gros de l’ouvrage. Ils finiront au Panthéon, vidé des Immortels.

 

La question de la valeur esthétique, de la qualité littéraire d’une oeuvre est à l’heure actuelle une des préoccupations majeures de certains écrivains, critiques et universitaires. Il sont de plus en plus nombreux à soulever le problème de la médiocrité d’une grande partie de la production littéraire française contemporaine, médiocrité entretenue et orchestrée par le marché éditorial et présentée souvent comme authenticité, originalité, « valeur sûre ».

ZUZANA MALINOVSKÁ – ŠALAMONOVÁLE « MOUVEMENT DE REFLUX» DU ROMAN FRANCAIS CONTEMPORAIN

 

 

Point de Prologue.

J’ai la mystique désévangélisée. La pire folie. La grande solitude. Au milieu d’un monde qui ne vit plus et d’une foule qui n’est plus.

 

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