Solaarien, je m’étripe à trop vouloir ciceroner de crachats les combats que je me livre à l’intérieur. Il ne me suffit plus de sortir mes boyaux devant la plèbe ivre de son horreur, pour que la putréfaction lave leurs yeux gerbeurs, j’ai désormais besoin de bien plus.
La nuit lancinante peuplée de milliers de moi éclatés hausse les sourcils, ceci n’est pas son affaire. Je ne lui en veux pas, de lâcher les ombres terrifiantes sur mes songes avortés, comment un monstre pourrait-il craindre sa propre monstruosité.
Et je me suis toujours juré que je ne me laisserai jamais dévoré que par moi-même.
La nuit regarde, se lèche les babines, elle a sur le bout de la langue cette douce saveur de sang frais, qui lui rappelle le meurtre du soleil. Les ombres me consument, je m’auto-combustionne, et ces milliers de moi dispersés dans le ciel font briller la voûte sous laquelle les proxénètes culbutent leurs putes. Un peu de romantisme dans ce monde de brutes.
Mes veines vomissent du magma en fusion, mon cœur est un cratère ouvert, et de loin c’est aussi beau qu’un feu d’artifice. Je ne refrène plus le furieux déferlement des laves qui me recouvrent de cendres. Les ombres sortent d’en dedans, m’avalent et me digèrent, et de loin c’est aussi salvateur qu’un phare dans l’obscurité des bateaux eux aussi ivres naviguant en eaux troubles.
J’ai fondu en larve au milieu de la nuit, j’ai essuyé ma boue avec la boue des autres, nous avons partagé, comme jadis avec du pain rassis et du poisson pourri, ce que nous avons de moche.
Et qu’importe le délit de solidarité dicté par les fossoyeurs de mains gantées de pureté, de cet agora où l’anthropophagie s’offre un menu festin, je suis un cadavre qui n’a plus rien à perdre. Une âme damnée qui n’a jamais cru que la promesse du paradis exigeait qu’on le mette aux fers. Le paradis peut aller se faire foutre.
Il reste peu de chose de moi. Les ombres de la nuit sont passées par là. Le magma m’a figé en roche, comme une statue de sel.
Mon cœur est désormais pierre, sur laquelle la seule église que l’on bâtira, sera celle de l’orgie permanente, où les vierges mourront constipées de l’hymen, où les seins des Femen serviront de vespasiennes, où la dépigmentation du réel se fera par la merde fermentée, et où le sauveur, le prophète, le délivreur, etc (excès-de-rats), bandera enfin en paix. Je veux dire en guerre. Veuillez rayer la mention inutile.
Gazéificateur sarinien, je m’al-assade dans mes habits rocheux, et les poignards des non-impies vindicatifs et barbares, se brisent en milliers de morceaux, qui volent, qui vont se planter, dans les artères des justes.
Ils saignent, de si jolies artères bien polies, bien civilisées, tranchées, ce n’est pas seulement douloureux, c’est une profanation.
Et les milliers de morceaux scintillent dans la nuit de mes ombres libérées, et de loin c’est aussi boréale que les nuages de fumée qui signalent aux fossoyeurs et leur paradis, que quelque part il y a de la chair qui brûle.
Immolation, par la nuit.