Bande sonore : U-Turn (Lili) – Aaron.
Au secondaire, à mon époque, il y a quelques milliards d’années-lumière et des poussières d’étoiles, les filles de petites tailles étaient surnommées L.S.D.
Parce qu’il ne leur était pas nécessaire de plier l’échine, de s’agenouiller, devant le Mâle dominant – droit dans ses bottes – pour assouvir des envies libidinales qui n’exigeaient à cette fin qu’un attouchement buccal.
Elles suçaient debout.
Pas naines du tout, elles étaient à la bonne hauteur.
Blow job, souffle et explosion en plusieurs respirations jusqu’à ce que rugisse le lion, indomptable. Roar, Katy Perry ne s’y est pas trompée. « I used to bite my tongue and hold my breathe », son inspiration est un vécu. La langue qui bite et la bouche qui retient le souffle furieux de l’animal lâchant sa bave blanchâtre, c’est clair pour Katy l’inspiration est empirique.
L.S.D., le cœur à l’ouvrage et la passionnante dévorante dévotion qu’a la bouche consciencieuse et perfectionniste, les demoiselles – futures femmes respectables – ne pliaient pas devant les salauds que nous étions, elles étaient par leur taille des féministes avant l’heure.
Aujourd’hui, les filles sont un peu plus grandes, naturellement ou généralement plantureuses comme des pornstars, les lèvres mimant le bec d’un canard – duck face qu’elles disent, ce qui signifie une bouche voulant téter un truc phallique, la colonne vertébrale en S afin de maximiser à la fois la poitrine et le fessier, et encore des envies d’en fumer quelques-unes – alléluia.
Comme me le confiait dernièrement Benjamin, les jeunes féministes d’aujourd’hui intellectualisent le coït durant le coït, elles se posent la question toute shakespearienne de savoir si la position proposée par leur partenaire de circonstance n’est pas trop animale – pour dire, rétrograde envers le genre féminin.
A notre époque postmoderne, d’athéisme, le missionnaire est mort, et les positions du Kamasoutra se résume de façon hamletienne à : être ou ne pas être animale.
J’imagine la tête desdits partenaires et leurs arguments pour justifier et faire accepter le doggystyle (d’ailleurs recommandé par des chercheurs, une question de santé)et autres prises de judo sur le tatamis-lit ou tatamis litique, durant la partie de jambes en l’air. Le coït n’est plus ce qu’il était.
De nos jours, au collège comme ailleurs, les pré pubères, les pubertaires adultes ou inversement, verraient Rose telle une demi portion. Idéale pour le bateau ivre du Kamasutra. Celui parce plus léger qu’un bouchon permet de danser sur les flots aux rouleurs éternels de la Mer, dévorant ces azurs lointains et si proches, de tout son être subissant les ressacs et les courants d’une pénétration aux rythmes lents, ou les tohu-bohus les plus triomphants d’une Aube exaltée.
Ils ne le décriraient pas tous ainsi. Mais vivraient, en s’assurant ou en rassurant l’autre de la non animosité du truc, chaque vibration des intimités se noyant l’une dans l’autre, corps-à-corps sous des cieux de b(r)aise, violenté par la passion, avec cette exhalation rimbaldienne.
Rose, une L.S.D, une demi portion, selon l’époque.
La démarche pistolero, autour de ses fines hanches de lourds flingues invisibles la faisant dandiner. La coupe capillaire ultra courte, sans frange, entre l’androgyne émasculé et la caricaturale lesbienne. Le visage sans fard, sans agents de conservation. Et autres arômes artificiels. Bio – qui ne soit pas du foutage de gueule. Véritablement nature.
Rose, la première fois, a lâché un « Hello » sodomite – du genre strapon – et, m’a tendu la main. La poignée était ferme, sèche. J’ai presque serré les fesses.
Des yeux qui n’hésitaient pas, n’évitaient pas, ne fuyaient pas. Le corps en avant, l’espace entre nous englouti, c’était un face-à-face digne des plus légendaires western spaghetti.
Rose était, en me basant sur le modèle d’Edward T. Hall sur la proxémie, dans ma sphère intime ; en plein dans ma bulle. A zéro pas de ma gueule Picasso dans les grands jours – qui n’est pas nécessairement de toute beauté (et c’est Dora Maar qui me l’a avoué il y a quelques jours). Son souffle dans mon visage, et mon haleine pourrie dégueulasse de fumeur irrécupérable dans la sienne.
Rose, la première fois, s’est rapprochée, m’a jaugé, m’a examiné, et a souri en jetant ce « Hello » qui a résonné dans l’espace clos d’un appartement montréalais typique du Mile End comme un « Oh Shit ! » Je me suis dit qu’elle et moi un jour ou l’autre finirons par être l’animal de l’un l’autre.
« Ravie de te rencontrer Dave ! » Dans son regard, il y avait du « Tiens, c’est donc toi l’enfoiré. » J’ai définitivement serré les fesses.
« …tout le plaisir est pour moi ». Elle ne m’a pas cru. Rose est une sceptique. Du genre Thomas. En plus compliqué. Le Christ lui apparaîtrait dans son authenticité la plus biblique qu’elle exigerait d’en avoir la certification par une mise à nu intégrale.
Elle le palperait, lui enfoncerait un godemiché dans son trou de balle, pincerait ses tétons, lui mordrait une côte, lui filerait quelques claques, et lui avouerait finalement, que depuis le début et sans possibilité de remise de peine, qu’elle est athée.
Que tout ça, d’une façon comme d’une autre, le Christ et les restes, c’est n’importe quoi.
« Criss ton camp ! » lui dirait-elle. Le Christ dégagerait. Lui qui n’aurait pu deviner malgré son acuité surnaturelle que la cause fût perdue d’avance.
Rose ne croit en rien, ne sait pas croire, ne veut pas croire, et ne saurait croire. Il s’en irait, décontenancé, se plaindre auprès de son père, lequel constaterait sa propre dévaluation, imposant l’urgence de s’offrir les services du meilleur spin doctor. Ou marketeur. Stratège en image et autres entourloupes.
Ce qui, j’en suis convaincu, ne servirait pas à grand-chose. Quand c’est foutu, c’est foutu. Certains le confirmeraient aisément. Hillary et son mépris des déplorables. Philippe des Couilles, le premier ministre du village québécois, convaincu millionnaire de son statut de pouvoir nourrir une famille comprenant deux ados avec un budget hebdomadaire de 75$. A ce point il n’est plus déconnecté, la zone n’a tout simplement jamais été desservie.
Rose est un public récalcitrant. L’aspect prépondérant de son caractère se trouve dans son besoin d’être marginale. Et on n’atteint pas le marginal. On ne lui plaît pas, on ne le séduit pas. Tout est vain. Son mouvement est solitaire et solitude, dans les vents contraires et dans les maquis de l’alternatif, passant sans raison, dans une logique quelques fois difficilement saisissable, sous le coup de l’impulsion, d’un monde parallèle à un autre, embrassant les difformités repoussoirs, s’enivrant de sonorités désaccordées dont les mélodies impropres ont plus de valeur que les musiques barbares qui font jouir les peuplades béotiennes.
Le marginal est un lieu où l’athéisme est avant tout un esthétisme – non pas révolté ou en révolte, en opposition et en revendication permanentes, encore moins un nihilisme obstiné réduit à ce simple acte qui serait de la sorte puéril – mais un esthétisme dans son sens philosophiquement hégélien. Un esthétisme aussi du grotesque comme un art primitif. La rencontre des Aventures de Simplicissimus (bien sûr en plus compliqué) de Hans Jakob Christoffel von Grimmelshausen, de l’Homme-dé de Luke Rhinehart, des Souffrances du jeune Werther de Goethe, et de tout ce qui a trait au cannibalisme des catacombes, aux figures olmèques, aux masques Kwele, dans un décor Villa Emo revu et corrigé par Gauguin grimé à la Marylin Manson. C’est insaisissable pour le Vieux Monde, naturel pour le Nouveau. Personnellement, j’ai le cul entre deux chaises.
Ainsi, chez le marginal croire c’est rejoindre la norme du vulgaire, celle qui dicte les codes moraux et sociaux, c’est bêler comme la masse devant la stature toute stalinienne d’un prêt-à-penser matérialiste, jouir de cette liberté ovine qui conduit au même abattoir, entrer dans le bocal des petits pois aux différences qui se ressemblent. Croire, c’est grégaire. Croire, c’est tellement bourgeois. Rose ne croit pas. Marginale. Irrécupérable.
Rose n’est pas intimidée, ni par la vie ni par la mort, encore moins par tout ce qui est entre les deux et se trouve dans l’au-delà. « Rien à foutre » m’a-t-elle dit à chaque fois que la question devait la pousser à choisir une case. Elle en a connu des casse-couilles, j’ai appris plus tard que dans la vraie vie c’était elle la briseuse du symbole sacré du phallocratisme. Après ma nuit avec elle.
Au bout de vraies fausses conversations, ces monologues juxtaposés dans un espace où les interlocuteurs parlent comme des bulles de bandes dessinées, Rose m’a demandé comme ça, de manière inattendue, entre deux gorgées de vodka et après quelques gigantesques clopes de marijuana : « On va-tu chez nous ?! » J’ai fait « Ouais ! » sans trop être sûr de mon consentement, d’avoir bien compris l’invitation ou non à laisser le lion rugir en elle, sur son visage, dans sa gueule, dans son rectum. Elle a souri, cette fois-ci c’était de l’ordre du « Holy shit ! Juste bite my tongue ! », j’ai acquiescé avec le même enthousiasme : « Amen ! »
Comment l’expliquer ? Rose a pris les choses en main dès que nous avons franchi la porte de son appartement. « J’aime pô trop niaiser » m’avait-elle prévenu. Fumant un joint dans une main, fumant un autre bien plus en chair dans l’autre. Sa polyvalence m’a subjugué.
Comment l’expliquer ? Rose et moi avons réécrit le Kamasutra dans l’esprit philosophique vegan. Pas de gymnastiques antiféministes pouvant éventuellement causées des souffrances animales. Pas de rosette éclatée à coups de massue, en toute conformité des lois du code painal. Pas de claques sur le croupion comme certains excitent les juments dans les western spaghetti. Pas de cheveux tirés comme on dresse une monture sauvage. Rien de tout ça. Juste du pur vagin vegan dans l’orthodoxie des Saintes Écritures bourgeoises bohèmes et autres sectes affiliées.
Rose, femen dans une ancienne vie, boulimique de la vie et de tous ses plaisirs, éco-consciente qui roule à vélo, voix à la Amy Winehouse, m’a lâché ce matin dans un message-texte aux tonalités un peu Metal Industriel : « Salut ! Toi et moi on ne baisera plus ensemble ! » Point. Aussi simple qu’une fellation. J’ai desserré les fesses.
Bande sonore : What’s up? – 4 Non Blondes.
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