Miel

Bande sonore : Kind of Blue – Miles Davis.

Hier, lorsque cindy est apparu dans son pantalon palazzo de carolina herrera qui lui donnait un air floral et beaucoup de suavité, j’ai revu la cindy de notre première rencontre. Hier, elle portait une blouse en soie de ronald van der kemp, et toute sa personne dégageait d’un magnétisme hypnotique. Hier, dans un restaurant ordinaire mais si agréable servant des spécialités venant d’Inde, cindy est rentrée et m’a plongé dans l’inconscience. Hypnose complète. Comme la première fois. 

Cindy, la première fois, dans nos regards échangés, j’ai su qu’elle et moi allions devenir presque inséparables; elle était vêtue d’une robe kali de owl paris, elle était tropicale dans un lieu tempéré, comment n’aurais-je simplement pas été immédiatement conquis, dès son premier coup de semonce, cette apparition presque de l’ordre de l’injonction : « Je t’ordonne de céder à la tentation, moi! ».

Cindy ne demande jamais la permission ou ne se gêne pas beaucoup pour obtenir ce qu’elle veut, elle ordonne et le truc s’exécute, c’est l’une des nombreuses raisons pourquoi elle et moi nous n’avons pas fini binôme. Je déteste recevoir des ordres. Cela est atavique, mes aïeuls non seulement ne baissaient pas le froc devant quiconque – fusse même dieu le père, mais ne toléraient aucun acte d’autoritarisme, têtes brûlées certains ont fini sur le bûcher.

Un jour, je serai réduit en cendres, ce qui n’est pas si catastrophique, comme belka tobis le dirait « Toi, tu ne crèveras pas ? » ce qui signifie qu’il y a toujours d’une manière comme une autre une justice et que j’accueillerai de l’autre côté, à armes ouvertes, tous ceux qui m’ont crevé, je serai justice. Comme le dirait ma décédée grand-mère « Quand tu craches en l’air, ne sois pas étonné(e) que ça te retombe sur la gueule ». Et comme le dirait l’autre « Dieu pardonne… moi pas ».

Cindy et moi, c’était voué à l’échec. Elle l’a su dès le premier échange, je l’ai su dans nos regards échangés. Nous serions inséparables parce que, comme on le dit d’où je viens, tout aéronef finit par atterrir quelque part, et – après avoir fait le plein de gaz et s’être délesté d’une partie de son poids – reprend sa course dans les cieux vers d’autres cieux. Cindy est mon aéroport, je suis sa piste d’atterrissage. Vice versa. Qu’importe le temps que nous mettons dans les cieux ailleurs, nous revenons toujours au bercail, soit pour faire le plein de carburant soit pour se délester ou être délesté de quelque chose. Hier, nous nous sommes délestés du trop plein, nous avons fait le plein de nous.

J’aime cindy. Elle a des yeux couleur miel, le regard conquérant, la présence volcanique, le verbe très monde contemporain avec beaucoup d’anglicismes pour montrer sa modernité, des goûts culturels très avant-gardistes pour dire à quel point elle est toujours en avance sur son temps, et des combats idéologiques pour se donner sens ou pour donner sens à toutes ses contradictions somme toute irréconciliables ou ses problématiques insolubles.

Cindy ne m’offre aucun moment d’ennui, il y a toujours une découverte et ce n’est pas simplement pour faire bonne impression ou que sais-je encore, cindy m’offre ses sens subjectifs de chacune de ses découvertes, et je m’y plonge. Par exemple, le restaurant indien qui hier a vu deux inséparables nomades se revoir. Une pure découverte de cindy. En dehors de son monde, de son univers gastronomique. Cindy surprenante, cindy comme dora exploratrice, cindy ou des pérégrinations qui me font si souvent pensé à cette émission télévisuelle : Rendez-vous en terre inconnue

Après de longues périodes de séparation, de silence, à chaque fois nous nous retrouvons à new delhi sur un boulevard montréalais. Cette découverte de cindy me met invariablement l’eau à la bouche, j’adore tout bonnement, tout gargantua que je suis. Cindy m’a dit une fois : « Tu sais, un homme, c’est le ventre et le bas-ventre, pas compliqué ! »

Cindy paraphrasait Lady Ponce, chanteuse populaire des couches populacières du pays de mes ancêtres. Musicienne qui a élevé l’obscénité et la vulgarité – comme on le dirait dans ces milieux embourgeoisés ou emmerdement bourgeois, baisant les lumières éteintes comme dans une production pornographique à la bruno b. – au rang d’art. Lady P. adore parler dans ses œuvres musicales de pénis. De cul. Des revendications et des confessions

Courbet en présentant sa vulve garnie de poils a choqué le monde hypocrite de l’art. Le temps passant, l’œuvre est devenue un incontournable, l’artiste a acquis la stature d’incontestable génie. Les bourgeois s’empressent de nos jours d’aller au musée pour admirer des lèvres vaginales généreusement offertes à l’œil voyeur-visiteur, ils sont de nos jours extatiques devant ce cul assez ordinaire et ressemblant à ce qu’il était certainement habituel de trouver chez la femelle de l’homme de Neandertal.

Jubilatoires ou contemplatifs devant ce vagin qui avec vulgarité et obscénité leur dit d’aller se faire foutre. Ils y trouvent quelque chose de transcendantal et l’écrivent souvent dans des revues et magazines lus par ceux de leur espèce. Ceux-ci à leur tour vont ensuite s’agglutiner devant le tableau en espérant redécouvrir le vagin de leurs femmes, ou que leurs femmes redécouvrent la beauté de leur ordinaire vagin parce que leurs maris préfèrent plus jeune. L’origine du monde est un foutage de gueule élevé au rang d’art. Un doigt d’honneur magnifique à l’ordre moral bourgeois, un original « Fuck you » comme on en fait plus de nos jours. De nos jours, les doigts d’honneur n’ont plus rien de transgressif, et la bourgeoisie analement convaincue a appris à jouir des doigts d’honneur sodomites. « Même plus mal. » Les bourgeois, de plus en plus sadomasos, ont érigé l’enculage (de mouches et autres) en un ordre normatif

Lady Ponce, elle, ne sera pas accrochée sur le mur d’un musée, mais fera à la fois rigoler dans les maquis du peuple d’en bas comme dans les chicissismes assommoirs du peuple céleste, et surtout aura l’effet viagra sur les couples qui ne savent plus baiser ou qui se demandent comment baiser parce que cela ne va pas toujours de soi – à cet effet, les couloirs de palais de justice sont bondés de couples qui n’en peuvent plus d’être des individus mal baisés. Lady Ponce devrait être comme Courbet prescrite en thérapie de couple, et même être remboursée par la sécu.

Bien entendu, au-delà de ça, La  Lady – qui ponce avec vulgarité et obscénité et à l’encre grasse l’hypocrisie toute aussi obscène et vulgaire de l’ordre moral bourgeois – devrait être transmise de génération en génération comme une tare, une tare salvatrice.

Cindy dans une lucidité Lady Ponce était désespérante et donc très attrayante. Elle savait ce qu’elle faisait, au mot près. J’étais la proie, cindy m’a mis le grappin dessus avec une facilité presque enfantine. Je n’ai pas crié au viol ou à l’agression mentale, au contraire j’ai bandé dans le restaurant indien comme rocco siffredi.

C’est aussi pourquoi j’aime tellement cindy. Parce qu’elle me fait bander, homme ordinaire à la Lady Ponce comme un résumé succinct, par contre ce n’est pas si évident d’y parvenir. Pute nymphomane, il m’en faut plus pour me dresser comme un cheval. Cindy l’a compris dès la première fois, une autre raison qui fait en sorte que j’ai besoin d’elle comme un aéronef qui vient faire le plein de carburant bien plus que de se vider.

J’aime cindy. Elle ne se résume pas à un bout de tissu, un minois, ou à un livre lu, encore moins à une masturbation intello-bof bof ou à un corps frisant la perfection qui durant nos ébats m’a si souvent donné mal aux couilles. Cindy est une mosaïque de découvertes qui ne sont pas pour faire semblant ou pour le narcissisme mais qui disent toutes les facettes de sa personnalité n’ayant rien de superficielle. J’aime cindy. Je dirais même que je l’adore.

 

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Je l’adore d’autant plus que lors de nos retrouvailles elle n’a eu de cesse de draguer tous les pénis qui traînaient par-là et qui ne semblaient pas pire. Avec elle, l’acquis est une incertitude, et sa liberté une sacralité.

Quand elle a envie de draguer, cindy drague, ouvertement, directement, sans égards à ceux qui sont autour d’elle – « Rien à foutre » aime-t-elle me dire avec sourire. Cindy, osée, cindy conquérante, cindy inénarrable, cindy viscéralement libre. Monarque des cœurs

Quand elle a envie de baiser, elle va voir un sex toy sur deux pieds et le lui fait comprendre. Cindy, mante religieuse, s’empiffre de la cervelle de ses conquêtes et les laisse sans possibilité de résurrection.

Et si elle a autant d’affection pour moi, je crois que c’est parce qu’elle n’a pas encore su comment me dévorer entier et de façon irréversible. Avec cindy, séduire ne suffit pas, elle a besoin de posséder l’esprit, en ce sens elle vise toujours plus loin, elle va plus loin, une vraie devise olympique : Plus haut, plus vite, plus loin, plus fort. Toujours. 

Comme elle me le dit souvent : « Pourquoi je n’arrive pas à être dans ta tête !!! » Les questions comme toujours avec elle n’en sont jamais. Ce sont des injonctions à obtempérer. Et mes silences sont des doigts d’honneur. Ce qu’elle apprécie, puisqu’elle et moi remettons toujours le couvert.

 

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Hier, cindy m’a fait part de ses plus récentes découvertes. Des trucs féministes, des trucs à la angela davis, des trucs avant-gardistes, des trucs pas encore de ce monde.

Tout le long, je l’ai écouté sans mot dire. Quelques fois, j’ai ponctué mon silence de quelques « Hum, fascinant. » et de « Comment expliques-tu… » pour qu’elle ne s’arrête jamais.

J’aime les bavardes, j’aime les moulins à paroles. Il m’est si souvent arrivé de tomber sur des pierres tombales qui au-delà de l’épitaphe ne savaient plus quoi dire d’autre d’elles, je me suis prodigieusement emmerdé.

Ces pierres croyaient que j’aimais les cimetières et certaines pensaient que j’aimais les carpettes, elles ont compris le même soir que les contraires s’attirent, je veux dire je ne veux pas rencontrer ou découvrir mon reflet dans le miroir ou l’écho de ce que je suis. Nous n’avons ni baiser ni remis le couvert. Je n’erre pas dans les cimetières, les cadavres et les tombes ne me font pas bander comme un âne. Et si je suis si souvent dans les cimetières c’est pour comprendre les morts et non leur faire l’amour. Je n’aime pas les cadavres. Ou je ne suis pas un thanatophile

Alors, cindy a la jasette, elle relève du vivant. Elle fait les questions et les réponses en même temps, moi il ne me reste que le « Hum » « Ah ha » « ‘K » et des interrogations juste pour qu’elle ne s’arrête pas. A la fin, cindy se sent toujours bien, et moi heureux de n’avoir pas été contraint de mener la danse, heureux qu’elle ressuscite le mort et donne vie au cadavre que je suis un peu trop souvent. Cindy se sent bien, et je me sens bien.

Et quand cindy se sent bien, généralement après le ventre satisfait, le bas-ventre criard de famine est la prochaine errance gastronomique. De new delhi au pays-bas. Sans transition comme le dirait le guignol. Errance comme le dirait le vent libre. Comme elle, je suis un nomade, et donc oui nous voyageons d’un bout à l’autre du monde, comme ça, pour le plaisir, pour nous découvrir.

 

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En laissant cindy devant chez elle, l’on ne s’est pas fait la bise, cela s’est passé comme au XIXe siècle. Un gentleman avec une Lady. Cindy ne bise jamais et ne baise jamais, le premier soir, avec les individus qui ne sont pas simplement des sex toys bipèdes.

Quand il est question de sentiment ou du « Il me plaît le con ! », le cul est un plat qui demande de la patience pour que la dégustation soit un vrai plaisir, un véritable enivrement des sens.

Dès notre première rencontre, cindy me l’a fait comprendre de manière assez claire. Et c’est pourquoi j’ai rarement eu autant de plaisir à me mêler au corps d’une autre personne. Egosexuel de nature, elle fait partie de cette espèce rare de personnes qui me fait découvrir l’allosexuel – cette attirance sexuelle pour l’Autre tel qui soit, qu’au fond une partie de moi est. Hier, la soirée, comme attendu, ne s’est pas terminé par une dégustation de bas-ventres. La soirée avait encore de belles (prochaines) nuits devant elle. Une autre raison de ma grande affection pour cindy. La dégustation. 

Avant de la quitter, cindy m’a demandé : « Qu’est-ce qui te plaît chez moi ? Tu ne me l’as jamais dit ! » J’ai regardé cindy, son regard éclairé par un réverbère aux lueurs timides, je lui ai dit : « Tes yeux couleur et douceur miel ».

Cindy n’a pas réagi. Ni contente ni emmerdée, encore moins ennuyée. Encéphalogramme normal. Elle m’a simplement dit : « Lud’, t’as pas changé. »

A quoi j’ai répondu : « Oui. Que du vieux. »

Cindy est rentrée dans son immeuble, et moi je me suis enfoncé dans la nuit comme un aéronef prend son envol pour et vers d’autres cieux.

Bande sonore : My Favorite Things – John Coltrane.

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