Il fait trop chaud pour baiser

Bande sonore : Norma – Maria Callas, London 1952.

Hier, Maria m’a envoyé un message sur Insta-Nombril-Gram : « Slt, t’es libre à soir pour du fun ? »

J’avais ouvert ma bouteille de vieux scotch, The Dalmore Constellation 1971, en compagnie de la Callas, à Montréal-Londres, j’étais en 1952. Je me suis servi un verre, en peignoir noir, sans rien en-dessous, j’ai bu mon verre, la Callas délicieuse comme une pipe de Shéhérazade me faisait un si grand bien.

« Shéhérazade a le sourire de la même nature que le souffle de Dorothée. Vent persan dans un désert saharien. Shéhérazade est toujours inattendu, un inattendu. Son sourire est un inattendu, renversant, et sa façon de le montrer aussi inimitable que quelques fois je me suis dit qu’un tel sourire était bonnement invraisemblable, comme s’il n’était que dans ma tête. Comme un soleil de minuit dans un monde imaginé. Et c’est seulement quand elle ne sourit pas, quand elle n’est pas là, que je me rends compte que Shéhérazade n’est pas irréelle. N’est pas un sourire irréel.

Je me sens toujours en compagnie de cette voix enveloppée dans une sorte de velours comme Shahryar intrigué curieux, souvent piqué au vif. La voix de Shéhérazade est un souffle brûlant qui ne me fait pas fondre, il me fait prendre feu, moi paille sèche. Elle m’enflamme. Feu de joie. Dans la nuit de nos ivresses, dans les mille et une nuits de notre ivresse. Jamais, la voix d’une femme ne m’aura fait un tel effet. Je me consume, à l’aube tout ce qu’il reste de moi est un amas de cendres. Je fus. Il ne reste plus grand-chose. »

« Une pipe, ce n’est pas si offensant, on l’entend quelques fois cela ne veut pas dire ce que ça pourrait signifier. Les circonstances les motivations peuvent atténuer ou relativiser l’acte, « Une fellation, ça ne compte pas ! » affirment plusieurs hommes et femmes. Tout ce beau monde a ses raisons, sa conception et son acceptation de ce qui est infidélité. On ne reprochera jamais à une bouche de s’empiffrer – faut bien se nourrir – en essayant d’autres saveurs »

Maria a remis le couvert : « ???? »

J’ai ouvert l’Insta-Nombril, il y avait plein de Ladies en string, presque seins en l’air, des mecs en bobettes pectoraux en l’air et zizis bien présentés dans un bout de tissu qui ne cache pas grand-chose. Il y avait aussi beaucoup de selfies, de gens ordinaires dans un océan de gens ordinaires, des selfies parmi tant d’autres, la même tronche dans un océan de tronches pareilles. J’ai ouvert le second message de Maria, il y avait des points de suspension comme quelqu’un entrain de saisir un message, puis le message m’est parvenu, un magnifique cul latino-québécois qui ringardisait presque les fesses de veronik.

« Hier, j’ai fait la rencontre des fesses de veronik, ce fût bonnement un coup de foudre intellectuel et artistique d’une intensité à laquelle je n’ai pas toujours été habitué. Je l’avoue, il ne m’est pas souvent arrivé de faire la connaissance d’une paire de fesses de cette nature, cela dépasse simplement l’entendement.

Du premier coup d’œil, l’on est clairement dans une autre dimension, les fesses de veronik sont hors-catégorie, sans doute inclassable à la tanizaki mais ça reste à confirmer, faut voir – je veux dire faut que je m’y plonge véritablement comme un lecteur carnassier et qui pénètre sans scaphandre et autre combinaison latex dans l’objet de sa découverte. »

Cul stringé, tout épilé, et cet espace entre les cuisses jointes qui me fait tant bander. Un vagin manifestement juteux, charnu comme il faut, vrai bifteck pour le carnivore carniste que je suis, je me suis resservi un verre de ce bon vieux scotch, je l’ai vidé en fumant un cigare Le Cohiba Médio Siglo d’un coin perdu sud-américain, la Callas jouissive à l’oreille ou plus précisément me faisait jouir en faisant l’amour à mon oreille. La Callas, on n’en fait plus beaucoup des comme ça de nos jours.

« Le « Thigh Gap » de Maddy me fait ainsi toujours l’effet spéléologue d’une plongée dans la cavité inexplorée d’un plaisir sans fond. J’adore. Que dire, je n’ai jamais su résister à l’appel d’une telle grotte Cosquer. Comme avec Tina, j’y ai peint les frasques de Salò. Aujourd’hui encore, il est possible d’admirer le salaud faisant de sa main « Hi ! » au Musée d’archéologie nationale de Saint-Germain-en-Laye. Certains y voient un « I was there », et d’autres la célèbre scène de « Titanic » de James Cameron dans laquelle Kate Winslet – tandis que Léonardo di Caprio l’a fait jouir – salue le public. Chacun sa perspective. L’art a toujours été, reste, un excellent test de Rorschach. »

« Je le dis d’entrée de jeu les gros caleçons ce n’est juste pas possible au XXIe siècle. Les grosses culottes aux largeurs éléphantesques, c’est anachronique. Les jeunes demoiselles avec une espèce de slip superman aux fesses, les jeunes hommes avec des caleçons comme il s’en portait en RDA ou chez les WASP d’aujourd’hui (comme d’hier), c’est un crime contre la modernité, je dirais même plus : contre la bander-nité et la mouille-rité. Sérieusement.

La modernité et les autres, c’est le string. Une ficelle qui divise l’amas fessier (intense ou modeste) entre la gauche et la droite tout en donnant l’impression d’une absence de frontières ou d’un schisme invisible, mur berlinois traversant un anus qui n’a rien demandé et qui était tranquillou peinard dans son coin, c’est la définition même du XXIe siècle. Tout est mélangé, tout est indistinct, tout est ouvert, et ceux qui n’ont rien voulu en reçoivent tout de même sur la tronche. […]

Le problème avec Mel’ c’est celui du slip très léniniste-marxiste de Marissa, et sa broussaille pubienne qui m’a toujours donné l’impression d’y voir Tarzan voler de liane en liane. »

« Effectivement, Noella est rasée, cela a du succès, et comparativement à la Parisienne ou à la Française – avait son ordinaire touffe pubienne néandertalienne – en faisant un cunnilingus à Noella je n’ai pas l’impression de brouter de l’herbe, je n’ai pas le sentiment de me taper un festin d’herbivore. Noella est vierge de toute broussaille, son public like, son livre est un bide attendu mais qu’importe, Noella est toujours pour beaucoup une salope, un modèle pour la majorité pour qui elle incarne tout ce qu’elle veut bien projeter sur elle. Quant à Hessel, il a liké la dernière publication de Noella sur VoyeurGram, elle était presque à poil avec un slogan marketing un peu dans l’esprit de résistance face au conservatisme de tout poil : « Comme Hessel l’a dit : Epilez-vous ! » Son public a lu, vu, et a liké. Tous se sont épilés. Noella, famous, influenceuse. Nouveau monde. »

Un mec en peignoir noir, pas sur un toit du monde avec les seins offerts à des ombres invisibles qui regardent cette paire de trucs en l’associant si tendrement au néant, le presque vide. Nan. Pas besoin d’être sur un toit pour faire mon youporn, le p’tit prince machiavélique a un minimum de savoir-vivre, je veux dire c’est vraiment un manque d’éducation d’offrir au vide sa banale paire de seins, faut quand même penser à tous ces malheureux et malheureuses qui se masturbent en pensant à toi, le gâchis est un putain de manque de savoir-vivre.

De mon côté, en peignoir noir, dans un appartement gothique, qui fait tant de fois résonner le nerd alert chez tous ces esprits un peu dérisoires qui ne savent rien du bon goût.

Quelquefois, je me suis souvent demandé qui baise avec, qui baise le goût dérisoire et banal des choses, qui baise avec le goût banal et dérisoire des trucs machins trucs, des malheureux et malheureuses sans doute. Des godemichés et autres langue-plastique ou chatte-latex.

Avec mon peignoir noir, sans marque chic ou bof-bof-bof comme tout ce qui est chic ou se passe pour chic – chico-bof-bof-bof-chic, sans marque superficielle de la superficialité du si bon goût dérisoire et banal des machins trucs machins, dans mon appartement gothique, la Callas susurrant à mon oreille des délices d’un autre monde, je me ressers un autre verre de vieux scotch, même cigare, et je présente ma paire de couilles bien rasées à des ombres invisibles qui ont la décence de me les lécher. Un peu de savoir-vivre dans ce monde sauvageon.

Rox m’envoie un message sur Fake-Book : « 1 = 69 ? »

« Rox’, pour ceux qui ne sont pas des intimes, roxy pour le pseudo réseaux médias sociaux, roxanne pour la police The Police, rox’ est comme la chanson, « You don’t have to put on the red light », elle baise sur le trottoir.

C’est ce que j’adore chez elle. C’est compliqué. C’est du niaisage. Ça fait l’amour comme une guerre sale ou une sale guerre »

Je finis mon verre et je vais pisser un coup. Durant le pipi, je lâche des flatulences digne du tintamarre du festival osheaga, flatulences bing-bang-boom, flatulences techno ou edm, flatulences festival de rock metal hard, mon anus a l’âme festive, cela est plutôt un bon présage.

« Ma salle de bain est le festival Osheaga sans les préservatifs usés et avec l’avantage qu’aucun artiste n’annule sa prestation onéreuse à la dernière minute – parce qu’il n’a pas su à temps, avant que son cerveau ne grille et que son cœur n’explose, stopper son oxygénation au sommet de l’Everest-cocaïne.

Ma salle de bain, c’est le club le plus branché de la planète. La version hype de The Truth dans la série Power. Point de rythmes stellaires passés par un DJ presque androïde shooté aux sonorités galactiques. EDM. Eurythmies Défoncées aux Magic-mushrooms. En matière de défonce, l’on a entendu mieux. Point d’odes robotico-psychédéliques à des dieux-rainbow venant du futur et roulant des mécaniques. Point d’étoiles, filantes ou pour le formuler comme de nos jours de « swipe left » – c’est-à-dire de rien à rien du tout, du néant à son infini. Point de ces étoiles mortes qui brillent haut dans des cieux aux nuages Tchernobyl. Nos « stars ».

Ma salle de bain, c’est le « Paradise city » avec des « Guns N’ Roses ». Far-west à la Quentin Tarantino où nu comme un vers je joue tous les Huit Salopards dans un décor médiéval Il nome della rosa créé par Umberto. Dans ma salle de bain, se joue une intrigue shakespearienne mise en scène par Warren Adler dans laquelle ma bouche lape la rose de Dorothée, et la sienne caresse mes épines. Jusqu’à sa petite mort, jusqu’à la mienne. Ce qui fait notre bonheur. Lorsque Gaston Bachelard a écrit dans La Psychanalyse du feu que « Pour être heureux, il faut penser au bonheur d’un autre », il venait d’assister – public attentif – à la p’tite baise de Dorothée et moi sous la douche. Danseurs fornicateurs, œuvres de chair, dans cette alcôve qu’est ma putain de salle de bain. Bachelard a psychanalysé le feu – Dorothée et moi, une b(r)aise incandescente. »

« Toi truc-truc, toi en truc-truc, seul(e), désespéré(e), baisodrome bipède, sex toy avec une cervelle (tu me pardonneras la présomption, il se peut que je puisse me tromper, cela arrive très souvent, tout le temps, le contraire par contre est rare), toi aduslescent(e) à presque trente ans (ou plus), toi ado à quoi vingt ans (ou plus).

Toi qui te la pètes un peu trop (toi spécialement j’aimerais tant ça que tu me pètes dessus, et 69), toi qui ne pètes du tout (je vois ton bâton dans le cul, je comprends ta souffrance).

Toi truc-truc, toi en truc-truc, toi rien-du-tout surcoté ou toi surcoté en rien-du-tout, toi qui aimes ça être sous le feu des éjaculations de voyeurs ou de masturbation (sous le feu des projecteurs qu’ils disent, belle expression réaliste, en français cela se nomme bukakke). »

« Stéphanie a lâché des flatulences, rien de bien terrifiant, normales ; ça ne sentait pas le dollar étatsunien, un peu de la vladimirienne poutine québécoise en décomposition, normal quoi.

Assis, en face d’elle, je regarde Stéphanie, elle est magnifique, ce n’est pas Une jeune fille assoupie de Vermeer, encore moins une Jeune fille endormie de Renoir, mais beaucoup de La jeune femme endormie de Bastien-Lepage. Une délicatesse, du velours. Stéphanie est une œuvre d’art d’une beauté inconcevable quand elle dort. Et moi, en position de Diogène nu peint par Bastien-Lepage, je parcours chaque détail de son visage presque onirique. Il me vient à l’esprit ces vers de La Nymphe endormie de Georges de Scudéry »

Rox insiste : « 1 = 69 ????? »

La bouteille de scotch strip my mind, la Callas se charge du reste. Je repense à toutes ces personnes qui ce soir ne pensent pas au cul parce qu’elles crèvent la dalle. Avant-hier, j’en ai servi de la bouffe à une foule entière, trop de pauvres dans un monde dit-on – selon les stats d’économistes obèses ou crevant pas la dalle – moins pauvre; icitte ce n’est pas les tiers-mondes mais c’est comme si, et encore dans les tiers-mondes ce n’est pas parce que les foules n’ont rien qu’elles crèvent nécessairement la dalle, icitte les foules n’ont rien et crèvent la dalle.

Comme Cabrel l’a chanté en parlant de Madame X, cette étrange dame qui s’accroche à la vie alors que tout la pousse à se jeter sous les roues d’un autobus, toutes ces misères dans les rues tout près de ces parkings où il y a tant de voitures de sport.

« Madame X n’a pas une vie avec des vers qui riment. C’est Cabrel qui y met de la poésie, un moindre mal. Il est comme ça. Lyrique. Crève-cœur. Che-Guevaratesque. « Madame X, toujours pas de chauffage ! ». On ne change pas le bonhomme. »

Mais ça, ce n’est qu’une chanson, la même rengaine, sempiternelle rengaine, du misérabilisme, à force de l’entendre on en est indifférents. En même temps, personne ne se lasse des mêmes selfies de cet océan de selfies, mêmes culs, mêmes tronches, même dérisoire et même banalité. Dans le tout-vu et tout-entendu, toutes les misères ne se valent pas en indifférence. Je me suis resservi un autre verre de mon bon vieux scotch.

« De toute façon, certains trouveront tous les superlatifs laudatifs qui flatteront votre ego. C’est l’humanisme façon réseaux sociaux.

Vous vous sentirez merveilleusement bien.

Ils ne le penseront pas forcement ou le feront pour leur prochain, le karma. Cela ne vous empêchera point de vous sentir galvaniser dans votre narcissisme.

Et vous redoublerez d’efforts pour montrer encore plus votre chiante de vie qui fera chier davantage le monde. Circulation circulaire. Spirale sans fin. Welcome to the Nombriland, the place to be. »

« À part ça.

Soyez bienveillants.

Je veux dire veillez sur vos biens.

Les mois prochains, l’astrologie signale que l’austérité rentrera dans la maison des pauvres. Et évitera celle des riches.

Rien de bien surprenant. Cette année, c’est l’an chinois du couillon.

Vous risquez d’être plumés, à moins que vous soyez déjà totalement à poil. Ou en solde, sur les étagères des supermarchés entubeurs.

J’ai dit A poil. »

Patricia m’a écrit sur Fake-Book : « You’re someone’s reason to masturbate ».

Patricia est une intello qui pour certains est asociale, mais Patricia ne l’est pas, elle ne supporte pas simplement d’être en présence de toutes les gueules. Faut dire, je la comprends un peu; certaines gueules non seulement sont d’un dérisoire et d’une banalité machin truc machin-chose mais leur tour de force réside dans le fait de toujours mener à rien, rien du tout. Juste des gueules, belles gueules, gueules acceptables, gueules qui se battent dans ce marché terrible des gueules sexy et autres famous, des gueules cute, des gueules et-cetera. Bref, rien d’inoubliable, tout dans les normes du zapping. Next.

« Vous, vous êtes et nous, nous sommes
Des culs pareils
Plus ou moins nus sous le soleil
Semblables jusqu’au moindre atome
Jusqu’au moindre trou de balle
Blancs, noirs, rouges, jaunes, créoles
Des culs pareils

Moi, j’ai des morpions, j’ai des hémorroïdes
Moi, j’ai des chancres syphilitiques, j’ai des syphilides végétantes
Moi, j’ai des ulcérations multiples, j’ai des purulentes d’adénopathie
Moi, j’ai des chlamydioses, j’ai de la donovanose
Moi, j’ai de la papillomatose, j’ai une pseudo-tumorale
Moi, j’ai de l’herpès, j’ai des infections à poxvirus
Moi, j’ai de l’amibiase, j’ai de la lambliase

Et nous sommes
Des culs pareils
Plus ou moins nus sous le soleil
Nageant dans le même aquarium
Dans la même merde
Tous tendus vers le même espoir de vivre

Quel que soit le prix qu’on se donne
Dans ce monde polychrome
Des culs pareils
Avec la même merde

Il n’y manque pas l’essentiel »

« Ma gueule? C’est une version paresseuse de Frankenstein par un Dieu atteint de la maladie de Parkinson.

Et elle ne fera pas un tabac chez Sotheby’s. Les riches n’ont aucun goût. C’est bien connu. »

« Quelqu’un, et ce n’était pas Carla Bruni, m’a un jour dit que :

Dans la vie, il y a les uns, les autres, et les etc. »

Patricia a rajouté : « As-tu lu le Où en est la théorie critique ? de Renault et Sintomer ??? »

Je me suis levé et j’suis allé encore pisser. Je suis un vrai pisse-minute. J’ai tout le temps envie de pisser, et je pisse très souvent partout et sur tout. Tout ce dérisoire, toute cette banalité, tout ce rien du tout saturé de riens-du-tout. L’autre jour, Josepha m’a dit que c’était sans doute dû à ma consommation excessive de café : « Ça scrape ta vessie ! » m’a-t-elle affirmé. Josepha n’a pas de véritable problème avec le fait que je pisse toutes les minutes, tant que je pisse sur elle. Josepha, passion liquide, douche en or, golden shower qu’ils disent, j’ouvre les vannes sur elle pour son bonheur, noyée dans les eaux ou renaissance d’un type born again évangéliste par les eaux, la vie éternelle quoi, putain d’humaniste.

« J’ai envoyé un message à Esméralda. « J’ai rêvé de toi. » « Ah ouinnnnnn !!!! Dave !!! C’est cute !!! » Accompagné de plusieurs émojis envoyant des bisous rouges comme des cœurs. Elle n’a pas voulu savoir de quoi il s’agissait. Esméralda s’est imaginée autre chose, et ce soir quand j’ai fait pratiquer ma langue sur sa cambrure aussi parfaite qu’une nonne s’offre au seigneur dieu le père, je me suis dit qu’elle a bien fait. En la dégustant, par des ronds et des danses et sans me marrer, lavette remplissant la même fonction qu’un moulinet, je parcours et fais le pourtour en ne négligeant aucun contour, ceci est une exigence d’amour, un truc presque humaniste. Être anulingue, c’est être humaniste. Faut avoir le cœur accroché pour aimer la merde des Autres. Se dévouer entier à caresser, à nettoyer, à discuter franchement avec le dégoût. »

La Callas a cessé de faire l’amour à mon oreille, c’est au tour de Miles Davis de prendre la relève, avec lui c’est toujours In a Silent Way, pas trop de chahut, de tapage, de tape-à-l’œil, ou de perce-tympan. Du savoir-vivre, et non pas de « la classe », parce que « la classe » c’est un truc de parvenus. C’est ce que m’a balancé Esty l’autre soir, entre deux parties de baise sans savoir-vivre.

« Durant les ébats, elle m’a demandé de la traiter de salope. Je n’en ai pas été capable. Le féministe en moi. Je l’ai traitée de chienne et de cochonne. C’était plus respectueux. Elle l’a apprécié. »

« Le vulgaire doit avoir de la classe. Je veux dire un peu plus de ce truc qui ne pue pas juste de la gueule, et qui quand il l’ouvre oxygène tout en mettant mal-à-l’aise. Le vulgaire juste pour le vulgaire, c’est comme lire Éric Zemmour ou Michel Houellebecq. C’est non seulement sans élégance (et vous le savez depuis La Lady en robe noire comme l’élégance me fait succomber, souvent entre les cuisses de la Princesses Leïla), mais c’est aussi ordinaire. L’ordinaire, comme se faire selfie tout le temps, comme aimer les strass et les paillettes, comme se faire sexy ou hot, c’est banal et pauvre. Un vrai truc de la populace. »

Esty a horreur de tout ce qui se croit classe, tout ce qui croit faire classe, tout ce qui fait classe : « Ce monde n’a rien compris ! » Je me suis dit : « Faut pas trop le lui dire », car c’est drôle, amusant. Perso, j’ai toujours eu un faible pour le tragico-comique (qui n’est pas le tragi-comique). Entre tristesse et fou-rire, aucune véritable fin heureuse mais des personnages toujours de haute extraction, j’aime beaucoup le mélange des genres. Esty m’a narré avec de solides arguments son point de vue, je l’ai écoutée en tirant une clope en pensant aux nombreuses façons de la faire jouir.

Esty est un peu snobinarde, mais pas une snobinarde qui se la pète et qui pète plus haut que son trou de balle, une snobinarde qui pisse sur tout parce que ce tout est simplement à chier. Esty snobe pas mal donc, en ces temps particuliers, ça occupe beaucoup de son temps.

Et quand il lui en reste un peu, Esty m’écrit, je passe chez elle, elle me narre tout ce qu’elle a snobé, les pathétiques ordinaires de la vie ordinaire, me baise et je la baise, me parle de sa job un peu snobinarde de responsable arts contemporains dans un musée en vue du mouroir montréalais, me baise bien plus je ne la baise, puis va s’occuper. Et moi, je retourne à mon peignoir noir.

« Moi, c’est décidé.

Comme Luc, cette année, je deviens vache et je regarde les trains passer. »

Esty m’a envoyé un message sur Insta-Nombril-Truc-Machin-Chose : « Visite du musée, ce soir ? »

Je me suis repris un autre verre de mon vieux scotch, j’ai rallumé un autre cigare, Miles Davis me racontait une histoire fascinante. Dans son histoire, il y avait de l’été, beaucoup de transpiration dans les bobettes, beaucoup de sueurs sous les aisselles, trop de poussières sur les corps, dans l’air, trop de flatulences dans les festivals, trop de démangeaisons sexuelles, urticaires de la libido sur les clitos et autres godemichés phalliques, trop de latex de plastique de condoms dans les conversations, trop de maladies vénériennes dans les bars, trop de trop, trop de tragico-show/chaud-comique et pas toujours si drôle que ça, trop chaud quoi.

Miles Davis racontait son histoire de la seule manière possible : in a silent way. Je lui ai servi un verre de mon vieux scotch, je lui ai offert un cigare sud-américain d’un coin perdu du monde. La Callas verre de vieux scotch en main s’est assise près de moi, Davis nous rafraîchissait.

Hier, j’ai répondu à tous ces messages : « Il fait trop chaud pour baiser ».

Bande sonore : In a Silent Way – Miles Davis.

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