Bande sonore : Fearless – Kellie Loder.
Hier, violetta buvait son vin-coeur, le romanée-conti grand cru de la côte de nuits, comme on caresse une peau sensible, par douceurs et par tendresse, il ne m’est jamais arrivé de voir quelqu’un boire un vin de cette façon, j’en étais simplement subjugué.
Violetta n’est pas douceurs et tendresse, ni tigresse ni rebelle, elle est juste ce qu’elle est comme elle est avec ce qu’elle est et du mieux qu’elle puisse être, ce qui en soi ne me laisse que peu de marbre.
La première fois que l’on s’est rencontrés, violetta m’a plaqué contre un mur et m’a enfoncé sa p’tite langue aventureuse au fond de l’œsophage tout en torturant par des roulements un peu beaucoup de contorsionniste la mienne.
La seconde fois, elle est restée assise sur son canapé, froide et distante, nous avons baisé nos cerveaux, ce qui l’a fait jouir, moi aussi.
La troisième fois, elle m’a embrassé, baisers-duvet comme si j’étais fait de porcelaine, touchers chopiniens sur mes lèvres, des regards de caresses, une bouche de tendresse, du feu sans violence incendiaire, j’ai joui, elle aussi.
Violetta, ce sont les quatre saisons de vivaldi, avec elle je ne sais jamais avant d’y être laquelle elle est.
Couchée près de moi, violetta buvait son vin, nue elle m’a toujours fait penser à un lieu de mémoire découvert par des archéologues consciencieux et conscients de son caractère unique.
Nue violetta est un vestige archéologique faits d’objets hors de leur temps, en dehors de leur époque, après la modernité ; en ce sens sa nudité si différente de toutes les autres est en elle-même hors de toute espèce de modernité.
Violetta est d’un nu postmoderne, cela n’arrive pas tous les jours, cela ne se rencontre pas à tous les coins de la rue. Et même sa baise est postmoderne.
Un coït de la fin des métarécits, point donc de féminisme avec du vagin-piranhas, de phallocratie avec de la bite-tomawak, de liberté orgiaque et d’égalité 69, de progrès doggystyle dans un beat en avant et en arrière, et d’émancipation comme un envol septième ciel, la baise selon violetta s’inscrit dans un moment de réécriture du sens conventionnel des choses et dans un contexte d’anomie généralisée.
Violetta est donc une baise en avance sur son temps ou déjà dans son temps, entre le précurseur et le contemporain, une baise découverte par l’archéologue que je suis, et j’ai rapidement compris dès les premiers instants que j’avais affaire à un objet unique en son genre.
J’aime beaucoup cette découverte, elle est palpitante, il y a beaucoup de prises de tête, d’imprévus, d’illogisme parce que quelquefois je l’aborde par une perspective absolument obsolète ou non-pertinente, celle du vieux et de l’ancien monde.
Et lorsque je m’en rends compte, j’adopte la sienne et tout devient si limpide, si excitant, si palpitant.
La découverte est chez moi comme le viagra chez d’autres. A la simple idée de découvrir les gens, les choses, de les voir donc, je bave comme le chien pavlovien, je remue machinalement de la queue.
L’autre jour, j’expliquais à rosetta à quel point le matin quand j’entre dans mon bureau, la simple vue de mes ordinateurs me fait bander.
Rosetta m’a regardé avec un drôle d’air, un du genre « what the fuck ». Elle m’a demandé : « les ordis t’excitent ?!! », rosetta n’était pas contente. Cela me semblait compréhensible.
Personne ne s’attend à se faire dire que l’on trouve des ordis plus aphrodisiaques qu’elle, et que l’on jouisse davantage à tapant sur un clavier qu’en partageant énormément de fluides avec un autre humain. Personne ne veut ça. Personne n’aime ça.
J’ai répondu à rosetta que la simple vue de mes ordis me met sous haute tension libidinale, non pas que les ordis soient sources d’excitation (je ne crois pas être un ordinophile ou souffrir d’ordinophilie comme une nouvelle paraphilie de nos temps techno-modernes, pour d’autres il est question de smartphonophilie doublée souvent de réseaux-sociaux-philie), mais c’est l’idée que les ordis vont m’ouvrir à d’autres mondes, l’idée que les ordis sont le médium me faisant découvrir d’autres univers.
Des univers en milliers d’onglets et de fenêtres ouverts donnant sur une véritable orgie de connaissances. C’est donc cette anticipation de la découverte qu’incarne les ordis qui me font bander le matin quand je rentre dans mon bureau et que je fais face à ces objets.
Rosetta m’a dévisagé, elle était entre le rire « t’es vraiment sérieux là ??!! » et la colère « bordel je viens de me faire un vrai malade !!! », rosetta a finalement après un long silence lâché : « t’es un spécimen très très très étrange toé !!! ». Nous avons plus tard, un matin, baiser sur mon bureau, je mâtais mes ordis.
La découverte a donc sur moi un effet proprement libidinal. Elle me met sous haute tension. Ma raideur est toujours dans sa forme la plus olympienne. Violetta m’offre ainsi une shape olympique.
Elle en crie toujours. Du bruyant, du tumulte, cela vient du fond de ses tripes, et à chaque fois je suis si bien après d’être frappé de surdité. C’est pourquoi nos conversations post-coït sont toujours en fait des monologues du vagin post-jouissance.
Elle parle, parle, parle, et je l’écoute sans mot dire. Sourd, je vois ses lèvres remuer, et tout ce que je m’imagine c’est elles enveloppant mon pénis. Ce qui me fait tout le temps sourire, sourire qui lui donne une certaine idée du bonheur qu’elle me procure, bien entendu une idée différente de la mienne. Et violetta en est toute heureuse.
Le bonheur des gens généralement m’importe beaucoup. J’aime que les personnes soient heureuses, j’ai un souci de leur bonheur.
Dernièrement, lors d’un dîner, andrea m’a demandé si je souffrais du syndrome de superman, elle croyait que j’étais attiré par les femmes en détresse ou qui ont quelque chose de brisée malgré leurs/leurres apparences normales. Elle était convaincue que j’avais besoin d’aller à leur rescousse, d’où le fait que je baise à tout va et que j’aime tellement les femmes, femmes si différentes les unes des autres.
Andrea avait psychanalysé le dave de ce blogue, le dave d’insta-nombril-gram, le dave de fakebook, elle en était certaine. Je ne lui ai d’abord rien dit lors de notre dîner chez moi, je voulais profiter de mon plat et de l’excellent vin qu’elle avait apporté.
Mais, andrea est du genre obsessionnel, il faut lui répondre, en fait je dirais qu’elle comme moi trouvons que le fait de ne pas répondre à nos interlocuteurs est bonnement un manque d’éducation et de savoir-vivre.
Mais, tout le monde n’est pas d’accord, nous n’avons pas été éduqués de la même manière, et nous n’avons pas la même définition du savoir-vivre, c’est en quoi la diversité est aussi importante, cela permet une redéfinition de nous-mêmes et une révision de la définition grossière que nous donnons aux autres.
Andrea déteste donc au plus haut point le fait de ne pas répondre à une question directe posée.
Comme l’autre me l’a dit ce matin : « Tu as le droit de me parler, j’ai le droit de ne pas te répondre dans l’immédiat, je n’ai d’aucune façon l’obligation de te répondre », à quoi je n’ai rien répondu d’autre qu’un « On s’est tout dit, prends soin de toi ».
En fait, je me suis rendu compte que d’un on ne peut jamais imposer aux autres son propre cadre symbolique, exiger d’eux qu’ils agissent dans les formes de respect et de considération de l’autre que soi que l’on voudrait, et que l’on aura beau tenter d’expliquer pourquoi nous considérons que telle ou telle attitude est somme toute inacceptable pour soi, les autres comme moi avec violetta qui parle, parle, parle, sont simplement sourds à nos propos.
De deux, que devant une telle situation il vaut mieux simplement s’éloigner vraiment des gens, les laisser dans leur réalité légitime que l’on a essayé de comprendre et qu’au fond dont on ne peut poursuivre la découverte parce que leur façon d’être nous montre à quel point nous appartenons à des univers diamétralement opposés et impossibles à faire rencontrer (à moins un peu que l’un ou l’autre se désintègre pour se dissoudre dans l’autre).
Quand vous êtes rendus au niveau où votre présentation de votre perception des choses est un motif de guerre, il n’y a pas d’autre possibilité que de laisser tomber. Laisser tomber comme frapper l’autre d’inexistence, l’autre est mort à tes yeux, l’autre n’existe plus.
Je n’aime pas la guerre, je l’ai en horreur.
J’essaie toujours d’éviter le conflit sans intérêt qui ne mène à rien qu’à comme l’autre dirait « du n’importe quoi », les tensions inutiles, les missiles envoyés dans la tronche, mais surtout j’ai en horreur le mépris, la condescendance, et cette indifférence qui n’est pas le simple fait de ne rien ressentir ou de s’en foutre mais de réduire l’autre à rien ou peu d’importance.
Dans la vie, quand je fais face à une telle situation je réagis de deux manières : soit je prends sur moi et j’essaie d’établir des canaux de communication permettant un dialogue véritable avec l’autre (dans une dynamique de reset), avec pour intention de découvrir le problème et donc de trouver ensemble une solution mutuellement satisfaisante mais surtout qui nous fasse avancer, progresser ; soit je réponds par la loi du talion, et contrairement à ce que les gens croient je suis impitoyable lorsque je rentre en guerre.
Je ne m’arrête que si l’autre est totalement détruit, anéanti, écrasé, sans possibilité de ressusciter d’entre les morts. Je ne m’arrête que quand l’autre a ressenti toute la violence de son mépris, de sa condescendance, de cette indifférence réductrice de l’individu à presque rien.
Et je n’oublie pas, je ne pardonne pas, je suis sourd à la compassion, à la pitié, à l’humanité, à tout ce que j’ai comme convictions.
Je suis une bête dans cette situation-là, d’où le fait sachant cela que je fais tout pour privilégier la première option.
Dans la première, je n’ai pas de difficulté à m’excuser (qu’importe si cela est de ma faute ou non, l’excuse et la demande de pardon sont nécessaires pour faire tomber la colère ou le sentiment produit par le conflit), à vraiment m’investir en toute humilité dans un reset dont j’espère rectifiera corrigera améliorera les choses.
Cette humilité ou ce premier pas vers l’autre, cette attitude conciliante, est très souvent prise pour de la faiblesse, un manque de fierté, une absence d’orgueil, ou que sais-je encore. J’en suis bien conscient, mais cela m’importe peu car je me dis que tant que la finalité que je poursuis est atteinte, cela nous permettra de nous sauvegarder comme dignité humaine, et que ce que les autres peuvent penser de ma faiblesse ou etc. ils ne s’en souviendront plus lorsque nous aurons appris à nous découvrir et à être-avec. Lorsque nous serons heureux de nous être découverts, personne ne se rappellera de tels sentiments. Alors, j’ai tendance à prendre sur moi, le principal à mes yeux étant ailleurs.
Cette nature sombre et bestiale de ma personne fait en sorte que je suis viscéralement un pro-paix, pro-amour, un bisounours.
Je sais le fauve qui sommeille en moi, et je l’ai tant vu dévorer tout dans une rage insatiable que je ne peux le laisser sortir sans avoir tout essayer, sans que je n’aie d’autre choix. Le lâcher de fauve après m’avoir dévoré de l’intérieur, le fauve s’évade de sa cage et met tout à feu et à sang.
Ma grand-mère à cet effet, gamin, avait l’habitude de dire que j’étais démoniaque quand j’étais en colère, je l’étais et je le suis très rarement en fait, mes colères sont généralement silencieuses. Les gens confondent colère et frustration, colère et agacement, mes colères je les avale comme on accumule dans son ventre et elles sont enterrées au fond de moi jusqu’au jour où je ressens comme une nausée parce que j’en ai trop avalées.
Une telle nausée fait de moi quelqu’un de méconnaissable, le démon surgit, ma grand-mère disait que j’étais en colère comme une personne possédée par le démon, certains amis d’enfance ont été physiquement pour le restant de leurs jours handicapés par ce démon, c’est à ce point-là.
C’est pourquoi je suis assez obsessionnel de la paix, que j’aime vivre l’amour, dans un rien dans un tout, c’est pourquoi comme le disait un jour Princesse Leïla à une collègue : « Dave, ce sont les accommodements déraisonnables ».
J’accommode tout le temps de manière déraisonnable tout le monde.
Mes collègues avec qui j’ai bossés l’attesteront, les personnes avec qui j’ai souvent été en relation peuvent le confirmer.
J’ai la conviction que découvrir les autres c’est être flexible, c’est les laisser être eux-mêmes, c’est les accepter dans leurs singularités même si elles peuvent nous indisposer ou nous taper sur le système – la question que je me pose toujours est de savoir si au fond c’est plus moi que les autres le problème et donc d’en arriver à relativiser un peu les choses.
Si j’accommode déraisonnablement, je suis particulièrement intransigeant sur certains principes et valeurs : le respect, l’authenticité, la dignité.
Le respect est fondamental, si j’ai l’impression de n’avoir pas été respectueux je me recouvre le corps de cendres et j’expie ma faute, j’accepte d’en payer le prix, le respect est non-négociable.
Dans la quotidienneté, le respect pour moi ce n’est pas le vivre et laisser-vivre, c’est le fais ce que tu veux tant que je n’ai pas à endurer les effets néfastes de ton action. Les gens peuvent bien être ce qu’ils veulent, seulement je n’ai pas à subir directement ou indirectement les effets néfastes de leur liberté. Mais aussi, surtout, le manque de respect chez moi est d’abord un manque d’éducation et de savoir-vivre.
Exemple, tu rentres dans le métro des individus ont les pattes posées sur les sièges, c’est un manque d’éducation et de savoir-vivre, donc un manque de respect.
Tu as des collègues qui ne font pas leur job, je m’en fiche pas mal, sauf que si je dois subir les effets néfastes de cela, je le prends comme un manque de respect.
Si je ne subis de tels effets, cela ne me dérange pas de faire leur job à leur place, parce que je me dis que j’en apprends un peu plus et donc eux ils manquent une occasion d’apprentissage, je me dis aussi qu’ils manquent une occasion de susciter la confiance des autres et donc qu’ils en subiront toutes les conséquences (un jour ou l’autre).
Ce que je trouve dans ce cas irrespectueux c’est quand un collègue ne fait pas son travail (même si je sais qu’il ne le fait pas parce qu’il croit niquer les autres ou abuser des autres) et qu’il se permette soit de critiquer le travail fait par les autres (du genre méprisant, ou de le déprécier ou le minimiser en termes de valeur, etc.) soit de se le réapproprier (comme s’il en était l’auteur). Cela n’est pas acceptable (c’est du mépris et du vol).
En fait, le respect c’est une façon non pas de se mettre à la place des autres, mais d’avoir un minimum d’éthique de dignité humaine (lois de réciprocité et d’universalité).
La question n’est donc pas une opposition de droits (j’ai le droit de et toi tu as le droit de) mais de considération de la réciprocité (est-ce que j’aimerais être traité de la sorte) et de l’universalité (est-ce que ce je fais est ce que tout le monde voudrait, souhaiterait, désirerait).
Le respect oblige ainsi à se décentrer un peu de soi-même (du j’ai le droit de) pour épouser la perspective de l’autre ou tout au moins passer de son nombril-subjectivité à la totalité-humanité.
Ce respect conceptualisé de la sorte exclut l’orgueil, l’ego, la prétention d’un libéralisme individualiste (libéralisme autocentré, non-allocentrique) souvent signe d’une grande immaturité (immaturité dans le sens d’infantilisme qu’est cette guerre permanente de droits subjectifs).
Cette compréhension du respect fait ainsi que je puisse être autant flexible, tolérant, ouvert, que ferme sur l’essentiel. Et je n’admets donc en général pas la moindre violation d’un tel respect, je le pardonne difficilement.
Si je ne pardonne pas, ce n’est pas faute de n’avoir pas essayé. En fait, j’essaie généralement trois fois de donner aux gens leur chance, de nous donner trois fois la chance du reset.
Au bout de la troisième tentative, dans le cas où les merdes n’ont cessé d’être accumulées, au bout de la troisième fois où le manque de respect s’est manifesté, il n’y a pas de pardon possible. Et même dans l’au-delà, en enfer ou au paradis, je ne pardonne pas.
Et quand je ne pardonne pas, soit je chosifie l’autre soit il devient du pur néant pour moi.
Chosifier dit chez moi la colère, l’autre est ainsi un objet, rien qu’un objet. Le néant implique chez moi que j’ai tellement de mépris pour l’autre ou une telle déconsidération de l’autre qu’il n’est plus rien, moins qu’un objet, il devient une inexistence, un vide, il n’a proprement jamais existé.
L’autre dans ce cas peut bien crever, vivre, ou que sais-je, cognitivement et humainement, moralement et sentimentalement, il y a chez moi un désinvestissement total. Le néant comme une double mise à mort : je l’efface (toutes traces de cet autre) et j’oublie tout de lui (du fait qu’il existe ou qu’il n’ait jamais existé). C’est irréversible.
L’authenticité est un principe et une valeur essentiels pour moi. C’est l’un des trois piliers de mon existence, et l’une des trois exigences que j’ai des autres.
L’authenticité, c’est simplement la nudité. Être nu, il n’est pas question de vérité, puisque la vérité est un mythe doublé d’une absurdité.
Il ne s’agit pas que de sincérité profonde, ni d’intégrité, encore moins d’exactitude ou de clarté.
L’authenticité telle que je la conçois est une émanation des sens et des significations d’un auteur qui peut être moi ou l’autre. L’authenticité c’est donc un ensemble de sens et de significations de moi ou de l’autre, c’est le fait d’attester ce que l’on est dans toute notre complexité, dans toutes nos imperfections et dans nos tentatives de perfection. Selon moi, l’authenticité est donc ce nu qui atteste de sens et de significations produit par la personne auteure de sa propre œuvre.
Ce n’est pas une copie, une imitation, une facticité, un emprunt.
Lorsque je trouve les gens inauthentiques c’est parce qu’ils reproduisent une œuvre empruntée à d’autres et sur laquelle ils apposent leur signature comme s’ils en étaient les auteurs, c’est en quoi l’inauthenticité est une malhonnêteté doublée d’un vol.
L’inauthentique est plagiat, l’inauthentique c’est un illusoire, une tromperie, un copié. L’inauthentique comme le manque de respect m’insupporte à un haut point.
Que les gens mentent – tout le monde ment, je m’en fous, qu’ils se mentent, je n’en ai rien à cirer (au pire je trouve cela triste pour eux, parce que je déplore toute la perte de temps et le gâchis que cela est).
Mentir et se mentir n’est pas toujours un manque d’authenticité, au contraire certaines personnes ont le mensonge (dans le sens d’affabulation, de travestissement, de prestidigitation) pour caractéristique fondamentale de leur personnalité et c’est en quoi elle est une partie consubstantielle de leur authenticité, le mensonge fait sens et significations quand on se rend compte qu’elle fait partie d’eux.
L’œuvre est en partie mensongère, une créativité permanente, une ré-invention, elle dit un sens et une signification, elle révèle ce que le mensonge tente de cacher et ce qu’il vise en fait.
Le mensonge à soi-même dit un manque d’assurance, clairement. Dans une certaine mesure, un déni de soi-même, ou une manière de se convaincre d’être autre chose que ce que l’on ressent que l’on est. On s’aveugle pour mieux se voir, mieux se voir – c’est-à-dire se voir comme on rend moins science-fictionnel un fantasme.
On s’aveugle pour rendre plus tangible et vivant une certaine idée de soi.
Quand l’on sait qu’une personne se raconte bonnement des histoires, alors ce récit romancé et fantasmatique devient une composante de sa personnalité, on sait que ce qui importe n’est pas tant ce mensonge de soi mais le sens et la signification de celui-ci pour la personne.
Alors, la personne apparaît ainsi dans une certaine nudité, créativité mensongère et aveuglement mensonger la personne paradoxalement n’a plus à nos yeux toutes ces fioritures, elle est une représentation et s’offre comme telle. La représentation (souvent comique, souvent tragique, quelquefois les deux à la fois) n’est donc pas en soi inauthentique, bien au contraire. Le personnage comme un mensonge (travestissement, illusion) prend pour médium l’acteur, l’acteur module le personnage (il l’investit), l’oeuvre comme représentation est donc ainsi authentique, personnage et comédien se confondent, il n’y a pas d’emprunt, de vol, etc.
Pareille pour la superficialité. La plupart des gens croient que la superficialité est un manque d’authenticité, possible, mais pour moi la superficialité est d’abord une question de valeurs ou de priorité accordée à certaines valeurs.
Les gens superficiels sont des individus qui priorisent la matérialité, la surface, l’apparence, l’image, en termes de valeur, au détriment de l’immatérialité, la profondeur, l’intérieur, de l’abstraction. Le sens de la vie se fait ainsi par ces valeurs-là, et c’est en sachant cela qu’il est possible d’avoir accès à leurs significations d’eux-mêmes.
Pour dire, la superficialité est une production de significations qui en dit beaucoup de ce que voit une personne lorsqu’elle se regarde ou se présente sur cette scène théâtrale souvent impitoyable qu’est la vie sociale.
Une personne superficielle est donc ainsi nue, une nudité qui l’atteste. L’œuvre n’est pas une copie, un emprunt, un plagiat, l’œuvre est simplement superficielle. On peut donc être superficiel et authentique, superficiellement authentique, authentiquement superficiel.
La dignité comme troisième pilier de mon existence, c’est plusieurs choses : le respect de soi, la personne humaine toujours comme une fin en soi, la noblesse (de la distinction), l’éminence de la valeur de la personne humaine. Envers les autres, la dignité c’est simplement la personne humaine comme une fin en soi et l’éminence de sa valeur.
Que les gens n’aient aucun respect d’eux-mêmes ou qu’ils n’aient pas de noblesse, c’est vraiment leur problème.
Par contre, qu’importe ce qu’ils sont, ils ne peuvent ni être traités comme des moyens seulement ni traiter les autres de la sorte, ils ne peuvent perdre de leur valeur éminente ni la faire perdre aux autres.
Bien entendu, cette exigence kantienne est surhumaine pour les humains que nous sommes. C’est un peu attendre des gens et de soi une certaine attitude digne de saints (comme peguy disait de kant : kant a les mains propres, mais kant n’a pas de mains; sartre ajouterait sans doute nous avons tous un peu les mains sales – pour dire, la sainteté est une fumisterie, personne n’est un saint, nous avons tous un jour ou l’autre, nous tous un peu beaucoup, les mains plongées dans la boue et le sang; comme l’autre dirait pour beaucoup d’entre nous, ce qu’il importe c’est de donner l’apparence d’avoir les mains moins sales que les autres quitte à les laver à l’eau sale, à les plonger dans l’eau bénite, ce qui n’enlève rien au fait qu’elles restent sales et nous sommes un peu tous sales). Je suis le premier à ne pas toujours être en mesure d’agir en tout temps en conformité de cette exigence. Je ne suis donc pas un saint, et j’ai les mains sales.
Seulement, je ne conçois pas que l’agir non-conforme à cette exigence devienne une norme éthique, et la violation de cette norme éthique de dignité doit être si exceptionnelle qu’elle est très rare. D’où le fait de me mettre rarement en colère par exemple. De chosifier rarement les autres, ou d’en faire le néant. Dans le cas échéant, il faut absolument expier sa faute. Et quand ce n’est pas possible, accepter toutes les conséquences quasi karmiques qui en découlent. Donc, à de rares exceptions, je n’expie pas ma faute, et je sais que le karma cette salope ne me fera pas de cadeau. J’assume. Je ne me trouve pas de raisons ni de justifications.
Andrea m’a envoyé chier une fois.
Il y a un an elle me l’a dit et je ne l’ai pas compris, je ne me suis pas rendu compte qu’elle m’envoyait chier; ce n’était pas assez clair, direct, disons je ne l’ai pas perçu comme ça.
Je crois que si je m’en étais rendu compte elle et moi n’aurions pas vraiment eu ce dîner. J’aurais tourné la page, et je crois même que je l’aurai déchirée, voire brûler le livre, et éparpiller ces cendres aux quatre vents.
Mais un peu étrange que je suis, je ne l’ai jamais su ou perçu de cette manière.
Elle me l’a avoué durant le dîner, et là j’ai compris un tas de trucs, son attitude, etc.
Durant le dîner, andrea m’a envoyé deux fois des missiles sur la tronche, deux fois j’ai essayé de reset, deux tentatives soldées par des échecs cuisants.
A la fin du dîner, lorsqu’andrea s’est barrée, j’en ai fait du néant.
Avant de se barrer, j’ai répondu à la question posée, celle de savoir si je souffrais du syndrome de superman : « Non ». Je ne veux pas être le superman de personne et je ne veux pas que les autres viennent à ma rescousse avec un slip léniniste-marxiste aux fesses.
« Et s’ils portent un string ? » « Làaa, tu me prends par les sentiments »
« Lollll »
« Mais, non. String aux fesses ou épilés intégralement, c’est non ».
Qu’ils se sauvent d’abord et ensuite qu’ils prennent des vacances, sur mars ou sur krypton.
Andrea a pris conscience que tous les dave qu’elle avait psychanalysés étaient simplement dans sa tête, un mirage.
Et je ne sais pas si elle le regrette, ou qu’elle a révisé sa définition grossière de ma personne, mais je n’en ai plus rien à cirer.
Je l’ai dissoute dans le vide, l’inexistant. Ma façon très bonnes manières langagières et autres de (lui) dire : « Go fuck yourself ».
Pendant tout ce temps, dans ma tête, à converser avec toi, violetta n’a cessé de parler.
Les quatre saisons avec beaucoup de parlotte. J’adore.
D’autant plus que je peux être dans ma tête tranquille, échanger avec toi, penser à mes ordis, errer dans une multitude d’univers, sans être obligé de faire semblant d’avoir une discussion avec une personne qui au fond comme la plupart des gens n’en a absolument rien à foutre.
J’adore violetta, elle me fout une paix royale quand elle parle, parle, parle.
À un moment, elle s’est resservi le romanée-conti grand cru de la côte de nuits, l’a caressé de ses lèvres, et elle a cessé de parler.
Un peu déçu, je me suis dit « Merde » je vais devoir remplir le silence par le blablabla.
J’ai rapidement pensé à lui parler de la découverte postmoderne qu’elle était pour l’archéologue que je suis, de sa baise post-métarécits, j’ai rapidement formulé plusieurs questions ouvertes dans ma tête, des questions qui puissent l’occuper pendant un bon bout de temps, le temps de repartir dans les errances dans ma tête et d’y faire tranquillement le tour.
Mais, violetta a repris la parole : « C’est bien tout ça, c’est quand qu’on y retourne ? » Elle était déjà nue, cela a facilité les choses.
Bande sonore : Porgy and Bess – George Gershwin.
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