
La bi-culturalité est l’objet de la présente recherche bibliographique. Et notre observation de cette bi-culturalité se fera à travers le primo-arrivant qui se trouve dans un contexte particulier (Vertovec 2010; Testé et al. 2012) et une situation spécifique (Ting-Toomey 2005; Vasquez 1998). Le primo-arrivant est entendu ici comme le migrant (précisément ici le migrant économique) qui arrive pour la première fois dans un pays afin de s’y installer durablement. Ce pays est son milieu d’accueil. Dans le cadre de cette recherche, ce milieu d’accueil voit les questions relatives au vivre-ensemble être des sujets du débat public (politique et social – Benhadjoudja 2014), débat sur les politiques de gestion de la diversité (ethno)culturelle (Vertovec 2010; Clifford 2000; Gilroy 2006), dans un contexte mondial contemporain où se constate la peur de l’invasion de l’Autre, la peur de disparaître (Appadurai 2006).
Dans cet environnement sociétal, ce contexte social et mondial, de discussion sur la pertinence du modèle multiculturaliste (Vertovec 2010) et sur le cosmopolitisme (Noble 2013; Roudometof 2005), ce migrant est dans une situation de désapprentissage des codes culturels issus du cadre référentiel de son milieu de départ (son pays d’origine) et d’apprentissage des univers de sens culturels de son milieu d’accueil (processus d’intégration) (Orbe, 1998, pp. 244-245).
Dans cette situation particulière, il est confronté aux enjeux de loyauté (par rapport à son milieu de départ) et de ressemblance (dans ses interactions avec l’exogroupe ethnoculturel dominant de son milieu d’accueil). Ce migrant sous pression met en place des stratégies identitaires lui permettant de gérer les tensions dans son intériorité et celles existantes dans son extériorité (Camilleri 1992; Dasen 2001).
Le Soi remanié ou actualisé (Bennett, 1986, pp. 192-193; Augé 2012) (nécessairement, puisque le propre de l’intersubjectivité c’est consciemment ou non remanier les sens identitaires des individus en interaction, nul ne sort indemne de l’intersubjectivité – Schutz, 2008, pp. 222-223) issu de cette gestion peut indiquer son état d’adaptation dans son milieu d’accueil (Stoiciu 2006).
L’adaptation entendue ici non pas comme l’adoption d’un comportement approprié par rapport à une norme sociale préétablie par l’exogroupe (exemple: ne pas porter le voile islamique dans l’espace public laïcisé), mais plutôt dans le sentiment personnel d’atteinte d’un bien-être, d’un état de développement personnel, une relative satisfaction née d’un sentiment d’équilibre entre les pressions de l’appartenance ethnoculturelle de départ et l’incorporation dans le milieu d’accueil (Chen & Starosta 1998; Ward 2008; Schiller et al. 2006).
Ce migrant adapté qui est-il? Une identité plurielle, multiculturelle, hybride, cosmopolite, transculturelle, bi-culturelle? Nous disons que son identité est dans le moment de l’observation qui lui est inscrit dans un contexte et une situation.
Autrement dit, tout dépend de. Dès lors, sans figer ce migrant dans une case prédéterminée, un espace identitaire clos et sans issue, sans généraliser cette possibilité à tous les migrants, nous présumons (comme d’autres présument le contraire) la possibilité de son identité bi-culturelle entendue ici comme celle d’une double identification (identification à son milieu de départ et identification à son milieu d’accueil) lui permettant de maintenir la relative loyauté envers l’endogroupe et satisfaire relativement les injonctions à la ressemblance de l’exogroupe.
La bi-culturalité comprise ici c’est le 1+1 = 2 (Kim 2008; Bennegadi 1989; Pereira 1997). Une identité bi-culturelle comme une acceptation d’une immobilisation par rapport à son milieu de départ et une volonté de se rendre compatible à son milieu d’accueil, il s’agit là d’une cohérence complexe (Camilleri 1989; Camilleri 1990) montrant davantage une identité paradoxale (dualiste) bien plus qu’un individu schizophrène ou souffrant d’un trouble dissociatif de la personnalité. Une identité paradoxale (Aubert 2006) qui peut donc être un pragmatisme, instrumentale, utilitaire, issue d’une stratégie de modération des conflits. Une identité bi-culturelle qui ne voit donc pas d’interpénétration de fusion ou de compénétration (Giraud 1987) entre les deux identifications. En ce sens, une telle bi-culturalité est un construit de ce migrant.
Elle peut aussi être une identité imposée (ou une assignation) par l’exogroupe dominant dans certaines situations spécifiques et dans certains contextes (Schroven 2016). Par exemple, sur le plan micro-social d’interactions comme Marcelino (2016) l’observe en étudiant “The African ‘Other’” – l’Autre migrant Subsaharien – dans les îles du Cape-Vert (questionnant d’ailleurs la part prise par l’hybridisme identitaire, le transnationalisme identitaire (qui reste avant tout une question de capabilité), dans le discours scientifique d’une certaine frange de chercheurs).
Plan micro-social dans lequel se joue les enjeux inhérents au stéréotype (ou le “sens commun” née d’une représentation sociale avec son “univers d’opinion”- Amossy & Herschberg, 2015, pp. 50-52), aux préjugés à la discrimination (Béal 2010; Bourhis 1994; Amin 2012). Sur ce même plan micro-social peut s’observer les identités réactionnelles, les identités dépendantes, les identités de principe, par exemple (Amin, 2012, p. 106).
Elle peut être construite par la structure administrative, le discours politique (Yuan 2015), sans qu’une telle construction ne tienne compte du ressenti de ce migrant – c’est-à-dire du sens identitaire qu’il se donne. Cette construction montre ainsi les limites de son agentivité.
Ou même une bi-culturalité revendiquée et assumée comme telle par ce migrant comme par exemple dans le cas dans une volonté de distinction ou de valorisation de sa singularité tant envers l’endogroupe que l’exogroupe. Finalement, comme le souligne Amin (2012) : “la théorie des stratégies identitaires est particulièrement riche et divers” (Amin, 2012, p. 106).
Ainsi donc contrairement à Giraud (1992, p. 398) cette construction peut bien évidemment être culturellement et socialement conditionnée mais aussi arbitraire. Tout dépend de. Et c’est ce “dépend de” qui sera analysée ici. C’est ce migrant bi-culturel qui est l’objet de notre attention.
Notre problématique questionne dès lors les situations qui voient la construction d’une bi-culturalité chez un tel migrant, en d’autres mots quelles sont les raisons et les causes d’une telle bi-culturalité? Dans quelles conditions cette bi-culturalité se construit-elle? Quels effets sur la discussion sociale voire politique autour de la question actuelle du comment faire société?
Notre problématique questionne aussi le concept d’identité(s) plurielle(s) dans les sciences humaines qui dit une lecture trop totalisante et uniformisante de l’identité du migrant. Pour dire : Tous les migrants ne sont pas des identités plurielles et tous les migrants ne sont pas bi-culturels.
S’il est admis que les “identités plurielles” sont une réalité, l’inverse est aussi vrai (Kim 2008; Schutz 2008), c’est-à-dire qu’une identité peut ne pas être plurielle et qu’elle peut résulter d’une stratégie identitaire de l’individu (Lipiansky et al. 1998; Oberg 1960; Park 1928; Stonequist 1935). En ce sens tous les migrants ne sont pas bi-culturels et tous les migrants ne sont pas pluriels, cela dépend de la biographie du migrant, de ses expériences archivées, des risques d’exclusion (Tap 2005), de ses compétences interculturelles (McAllum 2017; Yep 2000), du niveau de sensibilité interculturelle de son milieu d’accueil (Hammer & Wiseman 20003), de sa capacité à s’incorporer dans l’univers de sens culturels et de significations sociales de son milieu d’accueil. Bref, de sa situation et de son contexte propres (Sandel & Liang 2010) qui peuvent ne pas être ceux d’un autre (Amin, 2012, p. 110). Ce qui s’observe chez les uns n’est pas toujours ni généralisable ni transposable chez les autres (Amin, 2012, p. 110).
D’un autre côté, parler d’identités plurielles comme l’horizon indépassable de l’identité du migrant, est difficilement concevable dans la diversité des identités culturelles, puisque ce serait un a priori qui tendrait à uniformiser des complexités identitaires. Ce serait élaborer une typologie généralisée à tous les migrants indifféremment de leurs réalités singulières. La “Super diversity” (Vertovec 2015) n’aurait ainsi en toute logique aucun sens, car tous les migrants seraient présumés être des Hommes pluriels.
Il importe ainsi devant la complexité de la notion même d’identité (Brubaker 2001) de faire preuve d’humilité, d’ouverture d’esprit, d’esprit critique (Dubar 2007) ou comme le dirait Marcelino (2016) de procéder à une démystification des typologies identitaires concernant les migrants, encore une fois de revenir au contexte, à la situation, aux personnes dans leur moment. Notre recherche s’inscrit dans cette idée.
Comme le soulignait Maffesoli (2014), analyser l’individu (migrant ou non) postmoderne (Maffesoli 2018; Maffesoli 2011) dans notre société contemporaine néo tribale (Maffesoli 2011; Wang 2005), notre société contemporaine liquide (Bauman 2007) et de l’instant éternel (Maffesoli 2000) avec le brouillage des notions traditionnelles d’identité, s’intéresser à l’identité (en général) c’est prendre ou courir le risque de l’irrationnel (Maffesoli 2014). À cet effet dans cette recherche, nous allons prendre ce risque.
L’on observe une tendance en sciences humaines (du moins dans la littérature scientifique anglo saxonne) à avoir une lecture multiculturaliste (Vertovec 2007; Gilroy 2012; Gilroy 2006) de l’identité du migrant (pourtant figure insaisissable, identité foncièrement contextuelle et situationnelle – Cruz 2010; Chaouite 2011).
Le migrant ainsi regardé est une construction archétypale douteuse (Yim 2000) ou un concept trop rassembleur pour être honnête (In Shin & Jackson 2003; Benhamou 2005), un biais marqué pour le pluriel le multiculturel (Fistetti 2009) le cosmopolite le transculturel.
Le migrant dont nous avons précédemment présenté les traits est d’abord un individu de son temps, ce qui veut dire un Ego (Kaufmann 2001) qui peut être ce “Je” comme un autre (Kaufmann 2008) dans le jeu des infinies plasticités identitaires ou simplement un personnage (Stanislavski 1966) se mettant en scène dans le cadre d’une performance sociale dans ses interactions avec son environnement (Lipiansky 1998). Surtout si son contexte socioculturel est sous tension avec l’existence de conflits interculturels (Maalouf 1998; Ogay 2001; Orbe 1998; ). Regarder cet individu c’est se rendre compte du fait que l’identité est une notion trop incertaine (Gallard 2010) pour la mise en cage ou l’étiquette (Goffman 1992).
Notre méthodologie est une recherche documentaire et une analyse pluridisciplinaire (croisant les regards anthropologiques, sociologiques, de psychologie sociale, de communication interculturelle, d’ethnographie, de philosophie, etc.). Si la pluridisciplinarité pointe le risque de l’élasticité ou de la dispersion, elle permet aussi de ne pas prendre le risque de mettre les oeillères en se cantonnant dans une seule perspective et d’avoir la prétention de proposer une explication et une compréhension quasi universelles. La pluridisciplinarité nous permettra de voir comment les différentes approches de notre objet d’étude de nature complexe font ressortir une lecture plus nuancée, moins holistique. Aussi, la pluridisciplinarité c’est un choix de sortir du box.
Notre recherche se fera en trois temps : l’observation de la bi-culturalité comme un choix identitaire stratégique du migrant, l’examen des situations micro-sociales d’immobilisation créant la bi-culturalité, l’analyse des politiques institutionnelles et du discours public fabricant la bi-culturalité.
I – La bi-culturalité : produit identitaire d’un choix stratégique
Comme nous l’avons mentionné en introduction la notion d’identité étant en elle-même complexe, sémantiquement et conceptuellement éclatée, nous prenons le risque de la circonscrire dans le cadre de cette recherche. De la sorte, l’identité sera comprise comme les sens que se donnent l’individu (en général). Également, les étiquettes identitaires collées sur lui par l’Autre (Amossy & Herschberg, 2015, pp. 50-52). Et bien évidemment dans l’intersubjectivité, les sens révélés par l’Autre (Pensoneau-Conway et al., 2015). Ces sens peuvent être le produit d’une négociation, d’une identification dans un double mouvement d’extériorisation et d’intériorisation, d’une validation de l’image de soi (de sa face) autant que d’une valorisation de soi. L’identité peut aussi être vue comme l’état du Soi au moment où se définit un individu, ainsi une telle définition peut ne pas être la même dans un autre moment.
Identité postmoderne, post-authenticité : nouveau cadre analytique et discursif
Dans cette idée, l’identité peut être le produit d’un processus de stratégie identitaire (Camilleri, 1998; Vasquez, 1998) dans lequel l’on puisse observer une double dynamique d’assimilation et de différenciation (Lipiansky, 1998).
L’identité de l’individu (ordinaire) est dans les sens qui s’articulent et s’entendent (comme ils peuvent se voir) dans sa réponse à la question posée : “Qui es-tu?” (Hua, 2014, p. 202; Sarthou-Lajus, 2010), et à celle de “Qu’es-tu?”. C’est l’état de conscience et de connaissance de soi (du “being and knowing oneself” – Leve 2011).
L’identité dans cette perspective est un dévoilement et une affirmation de soi (exposition et expression de soi). C’est un récit narratif (Ricoeur, 1983, p. 355; Laceulle 2018). Ce qui soulève l’autre question de la capacité à montrer ou à se montrer et à dire son identité. Par capacité nous entendons ce qu’il est capable de manifester et d’en faire. Ce qui signifie qu’il est relativement autonome (compétence réflexive) sans totalement être libre (tenir compte des codes culturels, des structures sociales, respecter les règles de contenance de soi, et maîtriser les grammaires de la reconnaissance).
Une expressivité de soi qui également interroge son authenticité comprise ici comme la conceptualisation par l’individu de sa “vérité” de soi. Une vérité de soi dont il a conscience et connaissance qui s’expose et s’exprime dans une sorte de “liberté” de se sentir et de s’exprimer tel que l’on est (Collier, 2003, p. 12). L’authenticité comme l’être soi-même (Kaufmann, 2008). Un être soi-même (“be myself” – Lindholm 2013) culturellement influencé dans sa fabrication (Despret 1999). L’authenticité de façon plus large en anthropologie par exemple soulève au moins cinq dilemmes résumés par Theodossopoulos (2013) :
1) the expectation of a singular authenticity « deep » in oneself or beyond the surface of social reality; 2) the contradictions emerging from the opposition of authenticity with inauthenticity 3) the irony of the notion of invention of tradition (which deconstructs, but also offends); 4) the criteria involved in the authentication of the age of objects (with a consideration of their materiality); and 5) authenticity’s simultaneity, its contemporaneous multiple conceptualizations in context. I argue for a perspective on the study of authenticity that acknowledges the simultaneous co-existence of more than one parallel manifestation of authenticity in any given negotiation of the authentic.
Comme l’identité, l’authenticité exige la mobilisation de plusieurs perspectives ou approches. Pour Banks (2013), l’authenticité dans ce sens loin d’être un objet statique, figé, ou que l’on puisse réduire à un énoncé définitoire clos, hermétique, bien plus qu’un état est un processus utilisé de manière instrumentale (Jauréguiberry 2006) dans les interactions sociales et politiques. Dès lors, à l’instar de l’identité traditionnellement vue dans les cadres de la modernité (désormais analysée dans les cadres de la postmodernité : c’est-à-dire des cadres dans un monde qui voit la fin des métarécits, le brouillage entre la réalité et la virtualité, où l’individu hyperconnecté aux technologismes se construit une identité de l’avatar, de réalité fictive – Barus-Michel 2006), l’authenticité contemporaine est davantage une post-authenticité (Banks 2013).
L’identité postmoderne chez l’individu contemporain est caractérisée par deux éléments : la satisfaction de ses besoins immédiats et l’absence (ou la faiblesse) de loyauté (Aubert 2006). D’ailleurs, il est de moins en moins question d’identité – concept devenu archaïque dans la postmodernité (qui s’observe aussi en économie – Schinckus 2010) – que d’identification (tribalité) et de différenciation (entre Panurge et Erostrate – Javeau, 2007, pp. 36-57). La pluralité, la singularité, la différence répondent d’abord à la satisfaction des besoins immédiats d’un tel individu (ce qui peut en faire un individu paradoxal, Luhmann (1998, p. 1144) dira que le paradoxe est l’orthodoxie de notre temps, nous disons c’est le New Normal – Javeau, 2007, pp. 19-35; Lash, 1985, pp. 3-4; Lash, 1985, pp. 19-20; Bagnall 1999; Yousfi 2013; Lacan 2016; Pourtois & Desmet 2012; Hottois 2005).
Mais, bien entendu, il est évident qu’un réfugié Syrien coincé dans sa temporalité, évoluant dans son espace-temps particulier, avec ses contraintes, n’aura pas sans doute le même sentiment. Il est clair que le Palestinien ou le Congolais vivant dans un monde de privations, de chaos, n’aura pas la même réalité. Ce qui illustre aussi des limites à la fois du paradigme des identités plurielles et celui des identités postmodernes, et oblige à une prise en compte du contexte et de la situation. Pour dire, de garder toute nuance nécessaire.
Identité bi-culturelle du migrant : une question de satisfaction de besoins (immédiats)
L’identité donc comprise ici comme les sens que donne un individu (Calame 2016) à son être (le Soi) – trait distinctif ou singulier dans la multitude (Negri 2002; Hardt & Negri 2005) – peut se manifester dans une situation sociale, relationnelle, réflexive, et servir de source de motivation (In Shin & Jackson, 2003, p. 215; Molina Luque 2002). De la sorte, le même individu selon la situation et le contexte peut s’afficher (Meintel, 2008, p. 4) et être identifié de différentes manières (Ting-Toomey, 2005, p. 218; McAndrews & Bakhshaei, 2012, p. 946), se revendiquer d’un sens (ou de plusieurs) ou être assigné à un sens (ou à de nombreux).
Dans le cas du migrant (Salzbrunn 2017), l’identité subit d’inhérentes tensions liées au déracinement, au maintien des liens d’attache avec la communauté d’origine, aussi au processus (complexe) d’intégration dans sa société d’accueil (exigeant l’apprentissage de nouveaux codes des significations des attitudes culturels – Wu 2012). Dans cette dynamique, il peut arriver qu’il s’imprègne à divers degrés des valeurs de sa nouvelle communauté culturelle tout en conservant (à divers degrés également) celles de sa communauté d’origine, au point que cet individu peut se construire une double appartenance culturelle, se poster dans deux cultures différentes.
Le primo-arrivant voit entrer en jeu la question de son identité avant son départ (procédures administratives – ambassade, etc.), durant son déplacement (procédures frontalières, etc.), à son arrivée dans son pays d’accueil (processus de désapprentissage des sens culturels construits dans son ailleurs – Schutz, 2008, pp. 226-227 – et d’apprentissage de nouveaux sens culturels : processus d’intégration, qui s’effectue en puisant dans son bagage linguistique et culturel afin de sentir d’interpréter comprendre ou donner sens à son nouvel environnement linguistique et culturel, le processus d’intégration est ainsi une acculturation).
Comme le souligne Hua (2014, p. 204), un tel individu ira sans doute occupée une des trois cases suivantes : une identitée imposée (par son endogroupe ou par l’exogroupe), une identité assumée (acceptée et non-négociée par lui du fait de son appartenance à l’endogroupe), une identité négociée (cet individu aura justement soit remanié son affiliation à son groupe d’origine en la remettant en cause ou en y exerçant son agentivité dans l’idée de l’interactionnisme symbolique). Camilleri citée par Stoiciu (2008) fait plus simple : identité assignée et identité intériorisée.
C’est dans cet ordre de choses qu’un tel migrant se construira une identité bi-culturelle découlant d’une volonté de ce migrant dans son processus d’intégration de “rétablir une unité de sens” (Amin, 2012, p. 105) relativement cohérent, et oscillant entre la fonction ontologique et la fonction pragmatique (Amin, 2012, p. 105).
Toutefois, cette bi-culturalité, comme nous l’avons déjà mentionné, est la réponse trouvée à la satisfaction de besoins immédiats. En cela, elle devrait être vue comme un non-essentialisme, pour dire une identité qui n’est essentialisée. Elle ne devrait ainsi pas être comprise comme un simplisme réducteur de la complexité d’un tel individu, puisqu’elle n’exclut ni la notion d’une constitution évolutive du Soi ni la fluidité des identifications (Meintel, 2008, p. 5; Dervin et al., 2011, p. 167).
Cet aspect de la bi-culturalité du migrant est une solution temporaire permettant ainsi à cet individu de gérer d’une part les questions de loyauté ou d’allégeance envers le milieu de départ (le pays d’origine) (Dervin et al, 2011, p. 134; Bazonzi, 2016, pp. 207-213), de montrer qu’il reste l’enfant du pays (Wright 1988) aux yeux de cette communauté-là; d’autre part le processus d’intégration dans sa société d’accueil. Dans cette idée, la bi-culturalité serait une organisatrice et gestionnaire de liens (Métraux 2007).
Dans le premier cas du migrant issue des minorités visibles, l’enjeu de l’ethnicité peut être un élément déterminant dans le choix de la construction d’une identité bi-culturelle. Par ethnicité, nous entendons la “composante ethnique de l’identité sociale construite par un groupe de personnes qui partage des expériences sociales similaires et un sens de l’héritage culturel basé sur une nationalité commune” (In Shin & Jackson, 2003, p. 215). L’ethnicité est ainsi différente de la race ou de l’appartenance raciale (Banton, 2018, p. 100; Antweiler 2015). La loyauté par rapport à ce groupe d’origine (loyauté qui sous-entend aussi une solidarité revendiquée et assumée – Lenclud, 2008, p. 451) pouvant se manifester par la préservation de son ethnicité comme preuve pour les autres membres du groupe de son authenticité.
Dans le second cas, la crainte de la non-reconnaissance par les siens et de son exclusion du groupe, la gestion de son processus d’intégration dans sa société d’accueil avec ses exigences de conformité d’attachement voire d’allégeance (surtout dans le contexte sociopolitique d’une remise en cause du modèle multiculturaliste ou d’inexistence effective de l’interculturalisme), font de la bi-culturalité un moyen qui facilite les aller-retours entre l’ici et là-bas (sans être obligé de renier l’un ou de renoncer à l’autre).
Une telle construction bi-culturelle (qui peut ne pas exister chez un autre migrant, chacun ayant une biographie différente et une conception différente de la loyauté, de l’intégration, etc. – Cloos 2016; Polek & Schoon, 2008) laisse suggérer une forme de duplicité, de dédoublement, nous préférons y voir une dualité ou une ambivalence (Malonga 2006) aussi pertinente qu’une pluralité (identité plurielle, identité multiple).
Il est possible de regarder un tel individu bi-culturel comme un être atteint de schizophrénie, mais il serait plus judicieux de le voir comme un gestionnaire de liens (sociaux culturels) et de tensions (sociales culturels). Un équilibriste.
Par contre, un tel individu peut réellement souffrir schizophrénie. En effet, dans certaines situations et dans certains contextes, il est montré dans des études en psychiatrie que certains migrants peuvent dans leur société d’accueil développer des formes de schizophrénie notamment à cause des immobilisations identitaires auxquelles ils sont confrontés (Bhugra 2004).
Identité bi-culturelle, fruit d’une rationalité en finalité
L’exercice d’équilibriste auquel s’adonne un tel individu bi-culturel est une tentative de résolution de différents problèmes susmentionnés : intégrer sa communauté culturelle d’accueil, demeurer l’enfant du pays d’origine, préserver son histoire et sa mémoire (Cloos, 2016, p. 43). Un choix stratégique fruit d’une rationalité en finalité (dans son sens wébérien, c’est-à-dire une rationalité téléologique, visant l’atteint d’une fin bien plus qu’une rationalité de valeur inscrite dans un système de croyances). Une bi-culturalité issue d’une logique rationnelle, identité d’une cohérence complexe modérant les problématiques conflictuelles. Ce qui peut s’avérer insuffisamment ou un échec (nous en discutons dans la seconde partie de notre recherche).
C’est ainsi un choix stratégique qui peut s’entendre dans le “Je suis Haïtien et Québécois”. Un “Je suis Haïtien et Québécois” qui diffère par son absence d’hybridation du “Je suis Haïtien/Québécois” illustrant selon nous “la formation d’identités syncrétiques”, “une mixité individualisée” comme c’est souvent le cas chez les enfants de migrants (Meintel, 2008, p. 5; Le Gall & Meintel 2005; Plivard 2014; Lundy 2011; Bendixsen 2013; Qribi 2010). Des enfants de migrants qui peuvent aussi être dans une situation d’appartenances scindées. L’appartenance à la communauté d’origine et à la société d’accueil menant à une double marginalisation dans la mesure où il peut ne pas avoir une unité combinatoire possible entre les deux mondes de sens (Métraux 2007). Encore une fois, tout dépend de leur situation particulière, par exemple la classe sociale des parents, leur ethnicité, etc., et de leur contexte spécifique (Sabatier, 2013, p. 50). Par exemple, il est possible de voir la construction d’une identité bi-culturelle (par la transmission de la langue en l’occurence, la langue étant culturellement une expression identitaire) chez un enfant appartenant à une famille mixte où l’un des parents est un primo-arrivant et l’autre appartenant ethnoculturellement à l’exogroupe dominant (Pitchouguine 2007).
Dans cette première partie de la recherche, nous avons souhaité montrer comment une identité bi-culturelle peut être construite par le migrant lui-même et à quelle fin possible. Il est davantage pour lui une manière de résoudre une situation spécifique. Mais, cette construction peut ne pas procéder d’une telle rationalité, ou d’une telle stratégie. C’est ce que nous verrons dans notre seconde partie.
II – La bi-culturalité, produit des interactions sur le plan micro-social
Sur le plan micro-social des interactions personnelles, des relations intersubjectives, la bi-culturalité peut être construite par l’exogroupe. C’est-à-dire résulter des contacts entre le migrant et les autres membres des différents groupes ethniques (Howarth et al. 2014).
Dans cette situation, la bi-culturalité est davantage – précisément dans le cas du migrant issu des minorités visibles (Truchon 2017) – le résultat soit d’un renvoi presque permanent à la communauté d’origine par les individus d’autres groupes ethniques (Doré & Matta, 2011, pp. 51-52) soit par la persistance des stéréotypes ethnoculturels (McAndrews & Bakhshaei, 2012, pp. 936-937 et p. 940) dans les dialogues les conversations les échanges les attitudes (White et al. 2018, p. 170 et p. 173; Marcellino, 2016, p. 117 et pp. 121-128).
La bi-culturalité se présente alors comme une affectation à une case identitaire préétablie (Becker 2015) ou préconstruite qui montre pour l’exogroupe dominant à la fois incomplète appartenance du migrant à sa nouvelle communauté culturelle et la possibilité d’une non-exclusivité d’appartenance à sa communauté ethnique d’origine – puisqu’on le reconnaît comme membre de sa société d’accueil (“Tu es un néo Québécois!” ce qui peut être compris comme “Tu n’appartiens pas exclusivement à l’Ailleurs” ou “Tu es aussi des nôtres”). En France notamment, aujourd’hui il n’est pas étonnant ou inhabituel d’entendre un migrant pourtant naturalisé français et se revendiquant uniquement Français se faire assigner une identité bi-culturelle par le “Français d’origine”.
La bi-culturalité dans cette situation spécifique nous semble être une étiquette collée sur l’individu-migrant, un tel individu est posté dans deux cultures par les Autres. Pourtant, ce migrant ainsi immobilisé peut se localiser en termes d’identité (dans les sens qu’il se donne) aux frontières (Diasio 2016), qu’il se poste entre deux cultures (Cruz 2010), coincé dans une espèce de no man’s land.
Cette bi-culturalité imposée par Autrui, par les interactions au niveau micro-social, n’implique ainsi pas que cet individu particulier l’intériorise dans son Soi – “Je peux être bi-culturel à vos yeux, mais être multiculturellement mixte dans mon intériorité”.
Cette étiquette ou cette mise en case (cage) facilite sa lecture pour ceux qui le regardent, c’est une simplification (extérieure) de sa complexité identitaire. En quelques mots, l’on peut être vu comme bi-culturel à partir de l’étiquette sans l’être.
En ayant discuté de cette forme d’identité bi-culturelle, imposée dans les interactions sur le plan micro-social, nous allons nous intéresser à la construction institutionnelle et politique de la bi-culturalité du migrant.
III – La bi-culturalité, produit d’une gestion institutionnelle et du discours politique
La bi-culturalité comme le fait de poster l’identité du migrant dans deux communautés culturelles peut découler de la gestion institutionnelle (Oriol, 1979, pp. 23-24; Fulton et al. 2016; Cormack et al. 2012; Paret, 2011, pp. 88-90) de la diversité (ethnoculturelle) et du discours politique sur cette diversité.
La gestion institutionnelle de la diversité ethnoculturelle produisant une identité bi-culturelle du migrant se voit par la différenciation administrative entre les citoyens dits natifs et ceux qui ne le seraient pas. Il y a là une forme d’impureté identitaire introduite par l’appareil public administratif. C’est en ce sens que cette bi-culturalité pourrait être vue comme structurelle (Bauman, 1988, p. 66; Bauman 1999; Bauman 1996).
Elle peut également être un produit des politiques de promotion des identités dites plurielles dans le milieu d’accueil du migrant (Cloos, 2016, p. 51; Wieviorka, 1998, pp. 241-245 et p. 257; Bloemraad 2006; Rudolf, 2016, pp. 97-98). Ou bien encore dans la promotion d’une identité dite nationale dans le sens assimilationniste par “l’identification communautaire” qui “a tendance à forcer l’homogénéité d’ensemble” ignorant “la complexité extrême des références collectives” et “la flexibilité et la multiplicité des possibles” (Gallissot, 1987, p. 16).
Une bi-culturalité institutionnelle qui comme nous l’avons mentionné s’observe dans les différents statuts administratifs du migrant (Hasselberg 2016), mais aussi dans l’instauration d’un apartheid juridique qui pointe aussi l’impureté identitaire du migrant comme c’est le cas du statut relativement précaire de la citoyenneté du migrant bi-national (Jansen, 2013, pp. 94-102). Contrairement aux natifs, dans certaines situations, ce migrant peut être déchu de sa citoyenneté.
Il est possible d’objecter en soulignant qu’un tel migrant devrait abandonner une nationalité des deux nationalités afin d’être protéger par l’interdiction (par le droit international) des Etats (signataires de la Convention de New York du 30 août 1961) qui proscrit la création intentionnelle du statut d’apatride. La question soulevée par une telle remarque est de savoir si l’abandon de l’autre nationalité rehausse le sentiment d’appartenance à son milieu d’adoption (surtout si ce milieu nous a retiré contesté le droit de choisir sans crainte et sans peur d’être l’identité que l’on veut)? Si les natifs ont ce droit d’être ce qu’ils veulent, se (re)trouver les sens identitaires qu’ils veulent, pourquoi pas les autres? La remarque en elle-même renforce l’idée d’un apartheid, d’une immobilisation.
Une immobilisation par le statut administratif et juridique comme on peut l’observer chez les migrants irréguliers (Chauvin 2009).
Ou chez des migrants réguliers comme le montre l’étude de Ribert (2009) sur des Français issus de l’immigration, une étude qui interroge le “sentiment d’être Français” chez de tels individus et dont les témoignages montrent encore une fois que l’identité comme récit des sens de soi ne peut être uniquement plurielle ou seulement une (elle est dans le moment, la situation, le contexte, une fois de plus la divergence des réponses des enquêtés de Ribert conforte notre hypothèse). Ribert (2009) conclut son enquête par cette observation :
“Dans ce contexte, il convient plutôt de s’interroger sur les raisons pour lesquelles une telle importance est accordée au sentiment identitaire. La référence constante à la nation à la française, dans laquelle l’identité nationale primerait sur les autres identités, ainsi que la polarisation du débat public entre modèle d’intégration républicaine et multiculturalisme, semblent en être les causes les plus immédiates. Plus largement, comme le souligne Abdelmalek Sayad, cette interrogation sur l’identité est à référer à la position dominée de cette population. Il n’y a « d’identité en question que l’identité dominée ou l’identité des dominés » « Et c’est alors même qu’on verse maladroitement dans “l’individualisation”, dans la “privatisation” de ce qui est, au fond, une donnée objectivement sociale, collective, et qu’on incline à dire cela en terme d’identité, et d’identité personnelle […] qu’on trahit ce qui est au cœur de la naturalisation, à savoir que le sentiment de la nationalité se situe, chez les uns et chez les autres (chez les candidats à la naturalisation et chez ceux qui accordent la naturalisation) dans un rapport de forces, le rapport de forces entre nationalités et entre nations » En accordant peu d’importance à la dimension nationale de leur identité, en refusant parfois de se positionner, les jeunes résistent à cette privatisation. Ils signifient ainsi que les problèmes qu’ils peuvent rencontrer ne sont pas liés à leur identité. Ils ne sont pas personnels : ils proviennent de la société.”
Ainsi, la société d’accueil, l’institution publique et les pouvoirs publics peuvent construire une bi-culturalité du migrant (Karim, 1993, pp. 195-203; Burnet, 1976, pp. 202-206). Un exemple empirique est celui du contrôle au faciès (2004) (Jounin 2015).
Le discours politique dans le milieu d’accueil (et même dans le milieu de départ) peut construire l’identité du migrant (membre de la diaspora). Ce vocabulaire et ce langage élaborés autour du “Otherness” (Dick, 2011, pp. 229-232).
Si le discours politique par la référence communautaire (exemple les “Québécois pure laine” ou bien le “Nous autres”) peut immobiliser en assignant une identité bi-culturelle, le discours médiatique (Giasson et al., 2018; Fitzpatrick 2013) peut de diverses manières construire aussi une bi-culturalité distinguant les nationaux purs (Gallissot, 1987, p. 22) des “les gens d’icitte” – c’est-à-dire ce migrant qui ne le serait pas.
De toutes ces formes d’immobilisation (Jansen 2013), réelles, vécues (Laplantine 2017), ressenties, comme tel par le migrant (et bien entendu encore une fois tous les migrants ne les expérimentent pas ainsi : nous voulons dire qu’un Français blanc comme neige vivant sur le Plateau-Mont-Royal avec sa bande de Gaulois presque sans autre contact véritable avec son milieu d’accueil ou en contact avec des gens qui ne lui ressemblent pas, ne vivrait peut-être pas cette imposition structurelle institutionnelle médiatique de la bi-culturalité comme le Chinois ou Coréen travaillant dans un dépanneur exposer et en contact avec son milieu d’accueil), si l’on peut retenir deux choses, c’est une bi-culturalité (assignation, imposition) qui dit l’impureté ou la facticité de ce citoyen venu d’ailleurs.
Ce qui s’illustre de plus en plus dans le discours/débat politique français notamment, par l’expression “Français de papier”; ou au Québec par le “Ce n’est pas un vrai Québécois”.
Nous notons aussi qu’institutionnellement et socialement la bi-culturalité peut être imposée par une minorité culturelle aux fins de maintien de ses particularismes comme cela a été le cas en Nouvelle-Zélande (Bozic-Vrbancic, 2003).
Également, dans une société où la bi-culturalité est un mur de séparation (une frontière tracée) entre le “Nous” et “Eux” (Cloos, 2016, p. 38), cette forme d’immobilisation peut – dans la sphère privée ou intime du mariage mixte par exemple – être une possibilité d’interculturalité (comprise ici comme une rencontre entre des identités culturelles différentes et leur interpénétration) (Dervin et al., 2011, pp. 134-151). Le couple mixte peut être un exemple de renversement (deconstruction) du mur de la b-culturalité artificellement construite sociétalement. Quelques fois, dans ce couple mixte l’on peut observer une migration du/de la partenaire issu(e) de la majorité ethnoculturelle vers l’identité culturelle de l’autre minoritaire (Vasquez, 2014).
En somme, cette partie a souhaité s’arrêter sur les différentes formes de bi-culturalité imposées ou assignées au migrant sur le plan sociétal institutionnel politique administratif. Nous avons montré la possibilité d’une telle bi-culturalité. Quant à la question de savoir si c’est ce que le migrant peut “ressentir” ou autrement formulé est-ce vraiment son “sentiment identitaire” (le “real Self” – Meintel, 2008, p. 6; Porter & Washington 1993), l’étude de Ribert (2009) montre que c’est possible mais que les choses peuvent aussi être plus complexes. Tout dépend de.
Conclusion
En définitive, à partir de notre recherche sur les questions soulevées par la possibilité de la bi-culturalité comme nous le concevons et comme nous l’observons, nous en arrivons à plusieurs conclusions.
La première c’est le questionnement du concept d’identités plurielles comme lecture réductrice et simplificatrice (ou allant trop vite en besogne) d’une réalité bien plus complexe de la figure du migrant. En effet, ce migrant est comme nous l’avons souligné un être dans une ère du vide (Lipovetsky 1983) et dans une société contemporaine postmoderne. C’est-à-dire que contrairement à l’individu moderne mû par un projet collectif ou commun et un sens de la loyauté (comme par exemple le sens de la nation, ou le sentiment national, le patriotisme), il est avant tout celui de la satisfaction de ses intérêts personnels, de ses besoins immédiats, avec une loyauté sur le fil du rasoir. Cet être postmoderne est, dans notre portrait particulier, donc stratégique avec une logique rationnelle et une unité de sens à la cohérence complexe, dans un processus d’intégration. De telle sorte, que la bi-culturalité a une nature pragmatique.
Le migrant portraitisé dans notre recherche est celui dont l’identité est comme la notion insaisissable, puisqu’il peut être dans un moment un pluriel et dans celui d’après un bi-culturel, identité fluctuante comme ses liens sociaux liquides. Son identité est essentiellement dans le tout dépend de. Son contexte, sa situation, sa biographie, ses expériences archivées, ses compétences, sa capacité à exposer et dire son authenticité, etc.
Autant de paramètres, de motivations, de circonstances, d’enjeux qui font en sorte que l’analyser c’est courir le risque de l’irrationnel. Car, cet individu-là, être paradoxal, de contradictions, divers et ondoyant, mobile et immobile, sort de tout cadre théorique et discursif traditionnel – pour dire, celui du Vieux Monde. C’est dans ce sens qu’il faut prendre en considération le conseil de Amin (2012) : “Il semble pertinent de prendre un peu de recul et de trouver une manière originale de comprendre à la fois les besoins d’un immigrant, comme celui de donner du sens, par exemple, dans la gestion d’une identité interculturelle complexe, tout en tenant compte de ses besoins sociaux et de l’exigence qu’il a à concilier les diverses demandes (pressions) provenant de différents groupes auxquels il appartient ou non.” (p. 111).
La seconde conclusion est que cette bi-culturalité issue des interactions sur le plan micro-social, qui ne découle pas ainsi d’une logique rationnelle mais d’une imposition ou d’une assignation, questionne le niveau de sensibilité interculturelle de son milieu d’accueil (Bennett 1986; Bennett & Hammer 2011). Un questionnement qui s’inscrit dans celui de l’effectivité du vivre-ensemble et des insuffisances actuelles de l’interculturalisme. Le vivre-ensemble tel que conçu dans le modèle multiculturaliste canadien est une construction de mondes culturels à part, puisque vivre ensemble signifie co-exister respectueusement en partageant le même champ d’expérience qu’est l’existence.
De la sorte, vivre ensemble c’est être-à-côté (au lieu de l’être-avec) semblable à des objets d’un tableau de nature morte. La bi-culturalité imposée ou identité assignée, montre la nécessité d’établir cette intérité (Demorgon 2005) de l’interculturalisme (Dervin, 2011, p. 160 et p. 193) qui insiste autant sur la connaissance de soi (réflexivité) et la connaissance d’autrui (altérité) dans une société de subjectivités partageant leur singularité, non qui se limitent à la coprésence. L’intérité, c’est le mouvement vers, ce qui suggère des ajustements mutuels (l’acculturation – Berry, 2008, p. 331), une attitude d’accueil et une possibilité de transformation (Demorgon 2005; Marandon, 2003, p. 278). L’intérité comme être-avec (Nancy 2011) vise à conjuguer trois éléments liés et distincts : la particulier, le général et le singulier (Demorgon, 2005). Et cette conjugaison qui est un défi en soi nous semble manquer dans le vivre-ensemble actuel.
La troisième conclusion questionne les institutions publiques, les pouvoirs publics, les pouvoirs médiatiques, les acteurs autant politiques et sociaux, sur la pertinence des mécanismes d’apartheid entre tous les citoyens. Pour le dire, franchement, encore combien de fois devrions-nous attendre un massacre haineux et de terreur contre l’Autre culturellement différent pour que la bi-culturalité imposée cesse d’être une facilité qui construit l’inhumanité (Avanza & Laferté 2005).
Nous nous questionnons sur ce regard ségrégationniste qu’est la bi-culturalité aussi imposée sur la reconnaissance (ici il ne s’agit pas de “reconnaissance redistributive” (Meintel, 2008, p. 7) comme “la validation de l’autre, l’appréciation juste de l’autre” (Meintel, 2008, p. 10). Une reconnaissance pouvant être aussi vue comme une façon réciproquement de se voir ou d mettre fin à l’invisibilité des uns et des autres (Diasio 2016). La reconnaissance comme validation de l’existence de cet Autre (Giraud 2004) aux affiliations multiples (Erel 2015), ou non, ou une validation de son authenticité, de sa face.
Une façon parmi d’autres de réaliser enfin le vieux rêve kantien de paix perpétuelle (?)
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