C’est l’histoire d’un mec qui se met à courtiser assez intensivement une jeune fille. Déjà, il ne courtise pas, il drague. La nuance n’est pas subtile, elle est rentre-dedans.
Ils sont dans un supermarché. Devant un comptoir où gisent les restes de ce que fût un cochon. Il n’y a pas de lieu propice à la drague. Il y a des lieux qui ne lui conviennent pas. C’est tout.
Le supermarché. Les toilettes. Facebook, les réseaux sociaux, ces autres espèces de toilettes. L’arrêt-bus. Le métro. Le bus. Le club. La salle de sport, ou Gym, une question d’hygiène et de salubrité. La bibliothèque. La rue. La chambre. Le lit. Of course.
La liste est non exhaustive.
Draguer dans ces lieux devraient être considérés comme une faute passible de poursuites au civil. C’est un manquement grave à l’obligation de respecter les règles minimales de conduite.
Certes le Gentleman, la Gentry, le savoir-vivre, le savoir-séduire, sont morts depuis les Sixties, mais cela ne justifie pas et ne pardonne pas tout.
Draguer dans un supermarché, devant une tête de cochon, est en soi un préjudice important causé à autrui.
Toute personne a le devoir de respecter les règles de conduite qui, suivant les circonstances, les usages ou la loi, s’imposent à elle, de manière à ne pas causer de préjudice à autrui.
Article 1457, Code civil du Québec
A moins que cet autrui soit lui/elle-même une tête de cochon, ou un(e) cochon(ne).
Dans ce cas, c’est au criminel qu’il faille poursuivre les contrevenants.
Se balader avec sa tête de cochon en public devrait être une action indécente. Tout comme faire son/sa cochon(ne) devrait être du trouble à la paix et à la tranquillité.
Le lieu, un facteur aggravant.
Et tout bon séducteur qui se respecte le sait: draguer est vulgaire.
Le propre de la populace.
Les dragueurs sont des bouffons amusant les Seigneurs. Des gueux pour les petits bordels crasseux.
Une femme, un homme, qui a la moindre estime de soi, se sentirait fortement offensé par la drague.
La même chose vaut pour ceux/celles qui exhibent leur cul pour plaire. C’est plus que vulgaire, c’est primitif.
Primate.
Mais le mec au supermarché ne le sait pas. Il s’en fout. Un peu. Il a spotté un beau cul et il a eu une érection.
La bite a ses raisons que la raison fait bien d’ignorer. Elle commettrait un suicide.
Le mec a vu la fille dans son ultra mini short et il a tout de suite eu le coup de foutre. Ouais. Le coup de foutre. Certains sont si performants qu’ils n’ont pas besoin de préliminaires, et de tout le reste. Ils dégainent. Version hyper fast de Lucky Luke. Update 2.0.
La fille a vu le mec avec son body de la mort. Son six packs. Trop cuuute. Elle n’a pas remarqué l’obèse qui la file depuis qu’elle est passée par le rayon des serviettes hygiéniques.
Trop focusée sur le beau spécimen homo erectus.
Elle a fait semblant, pour ne pas paraître totalement crazy, ou en manque, ou simplement nympho, bitch. Mais suffisamment pas assez pour attirer l’attention de sa proie. L’art de la séduction selon les normes contemporaines est un intuitif dosage d’exhibitionnisme et de nudisme. Il faut montrer beaucoup pour espérer jouir un peu.
Le mec a a donc vu son cul. Puis ses seins. Ensuite, sa tête. Cupidon a bandé son arc. La suite est une flèche décochée qui se divise en plusieurs bouts et qui vient se planter sur le cul, les seins, la tête. Fall in libido. Une love story contemporaine.
xcuz mwa mè tè vrèman hot, sa tdirè pa 1kfé
La fille entend du de Lamartine. Les mots ont un pouvoir oestrogénique. C’est l’essence du romantisme au XXIe siècle. Faut que ça fasse mouiller. Lacrymal ou autrement. Nul besoin de lyrisme homérique, les Casanova d’aujourd’hui , fornicateurs mécaniques, maîtrisent leur affaire, et les donzelles fondent. Littéralement.
Elle fait lol. Quelques mdr. Le mec like.
C’est l’éducation sentimentale sans Flaubert. Don Juan sans Lord Byron. Tristan et Iseult sans réellement aucun des deux. Le Rouge et le Noir sans autre ambition que de finir dans le noir, écarlate de passion. Le rien de l’ordinaire de Ulysse de James Joyce sans force évocatrice.
Mais c’est surtout l’inconnue de Stefan Zweig en lieu et place de la lettre, un texto-tweet verbal d’une intonation postmoderne: tu veu genre alé chez nou aprè, just chill & netflix, genre…
…Why not…
À cet instant, la trop adolescente caissière avec des cheveux d’une blondeur désespérante m’arrache à cette scène d’un surréalisme surréaliste.
msieu pouvé vou passé par icitte silvoupleuuuh!
En passant le portique, je jette un dernier regard à mes beaux amoureux.
La photographie est superbe.
Une sorte de soap opéra dans un décor imitant bien le cimetière du consumérisme, écrit pas un analphabète fonctionnel de souche, réalisé par un ostie de tabarnak de fucké, de souche lui aussi, produit par un mongol. De souche.
TVA nouvelles en est ému aux larmes. Le Journal de Montréal en fait sa Une. Le Journal de Mourréal lui est crampé de rires. Ce qui ne fait pas rire Le Journal de Montréal.
Ni Jean-François Lisée, c’est de l’ordre des valeurs québécoises.
Ni PKP, l’esprit dans la réalisation d’un divorce médiatique pornographique.
Ni moi. C’est de l’humour facile. Populaire. Populacière.
Je suis élitiste.
Je ne ris que de la connerie.
La vraie. Pure. De souche.
Épilogue
Ils fourrèrent.
Et n’eurent pas d’enfants.